Délirant - Thoughteater

Chronique CD album (38:20)

chronique Délirant - Thoughteater

Après avoir marqué les esprits avec un premier album sorti sur un label relativement confidentiel, D.B. revient en force avec son projet tant attendu, Délirant, cette fois sous l'égide de Sentient Ruin Laboratories. Près de sept ans se sont écoulés depuis sa dernière sortie, une période durant laquelle l'artiste a su faire monter l'anticipation et la curiosité autour de son retour. Il y a un mois, Invisible Oranges a dévoilé un extrait captivant de ce nouvel opus, attisant encore davantage l'impatience des auditeurs. Parmi eux, je me suis laissé séduire par cette avant-première prometteuse, espérant être transporté dans un univers musical à la fois halluciné et décadent. L'attente a été longue, mais elle en valait la peine.

 

Oui, elle en valait la peine : je tiens déjà là un des albums majeurs de 2025. La dissonance est ici élevée au rang de table de lois, et le groupe en a fait, pour mon plus grand plaisir, son fond de commerce. Plutôt que de miser sur un matraquage incessant, il joue sur de fréquents changements de rythmes, ce qui le rend d'autant plus imprévisible. Ces derniers sont essentiels pour apporter du dynamisme à cet ensemble si difficile d’accès, où la moindre prise auditive (comme, par exemple, le passage plus mélodique aux deux tiers de « Thoughteater VI ») est la bienvenue afin de dompter le magma déversé tout au long des sept pistes, sombrement nommées « Thoughteater » de I à VII. Ce choix a certainement été fait afin de renforcer l’impression que cet album est un bloc massif, aussi inébranlable que le monolithe de 2001 : L'Odyssée de l'espace, aussi insondable que Ginnungagap.

 

La fin de l’humanité est proche, Délirant en a été témoin et est revenu pour nous le dire. Thoughteater est la bande-son de l’Apocalypse, du destin final des puissances. Mais, si tout cela n’était que tromperie et que le groupe ne nous dévoilait que ses cauchemars, sa vision altérée par de mauvaises drogues, des illusions fugaces du voile qui se déchire ? La fin de l’album semble vouloir révéler cet espoir ténu, cette chandelle chancelante au milieu du chaos originel. Mais l’avenir est-il plus réjouissant que les instants présents ? Délirant se fait héraut de cette noirceur, où l’espoir est ténu, mais il convient à chacun de le trouver et de s’y agripper – l’Espagnol ne nous facilitant pas la tâche dans ce domaine.

 

La musique de Délirant rampe, insidieuse, avant de frapper avec une brutalité foncièrement honnête. Jamais elle ne semble vouloir simuler une quelconque posture trve, bâtie comme un rituel noir, fondamentalement underground, au sens premier du terme. Une fois que les dernières mesures s’évanouissent dans le vide, l’auditeur est livré, hagard, à ce sentiment d’abstraction bien réelle. 

Thoughteater est une œuvre exigeante qui devrait plaire aux amateurs de Black Metal tendu et dissonant. Sans chercher à plagier les maîtres du genre comme Deathspell Omega, Délirant est loin, très loin, de ce que peuvent proposer les Français.

 

Si la fin des temps doit ressembler à ça, autant s’assurer d’avoir un bon casque et une boîte d’aspirine sous la main

 

photo de Xuaterc
le 17/03/2025

3 COMMENTAIRES

Pepo Moltes

Pepo Moltes le 30/03/2025 à 13:24:07

Merci Xuaterc pour cette découverte, aussi belle qu'éprouvante. Et comme c'est la première fois que je poste ici, merci à toute l'équipe pour le travail de défricheur que vous abattez, ça aide grandement à s'y retrouver face aux nombreuses sorties et nouveautés

cglaume

cglaume le 30/03/2025 à 13:33:34

❤️❤️🙏

pidji

pidji le 30/03/2025 à 14:39:27

Merci bcp pour ce commentaire, ça fait plaisir ! 


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