L’inquiétude des personnes les plus vulnérables face à la Covid, alors que les restrictions sanitaires sont relâchées

L’épidémie est loin d’être terminée mais le taux d’occupation des services de réanimation étant contrôlé, il a été décidé le 14 mars de lever, en grande partie, les restrictions sanitaires mises en place depuis deux ans pour nous protéger du Covid 19.

Bien entendu, il est temps d’apprendre à vivre le plus normalement possible avec ce virus, cependant, il n’est pas question d’oublier les personnes les plus fragiles chez qui la vaccination se révèle inefficace ou insuffisante. Parmi elles, il y a les personnes « immunodéprimées », qui sont par exemple obligées de prendre à vie des immunosuppresseurs, suite à une greffe, pour éviter un rejet du greffon, ou qui sont sous traitements lourds pour un cancer et qui voient leur système immunitaire affaibli, ou bien encore les personnes traitées pour certaines maladies auto-immunes, etc. Face au moindre virus, à la moindre bactérie, la santé de ces personnes est en grand danger. Ainsi, pour elles, le variant Omicron, plus contagieux que les précédents, présente un risque parfois vital, une épée de Damoclès au-dessus leur tête au quotidien, alors que dans tous les lieux de loisirs et au travail, le masque est abandonné et que le lavage des mains ou l’aération systématique des pièces risquent d’être vite oubliés.

Alors que les contaminations repartent à la hausse, France Assos Santé appelle chacune et chacun à rester vigilant.e et à continuer de respecter les gestes barrières. En présence de personnes vulnérables, en particulier à l’intérieur, le port du masque reste recommandé. Soyons solidaires, comme le rappellent les associations de patients.

Une campagne d’affichage pour ne pas relâcher la solidarité et continuer à penser à adapter les gestes barrières

L’association Renaloo, qui défend les patients souffrant de maladies rénales, dont un certain nombre sont greffés, a diffusé une campagne de communication pour appeler à la solidarité envers les personnes qui restent fortement exposées au risque du Covid, alors que la levée des mesures sanitaires, et notamment du port du masque, se généralise dans un contexte où le virus circule toujours activement.

Si cette campagne est accueillie avec une certaine agressivité sur les réseaux sociaux, Magali Leo, en charge du Plaidoyer chez Renaloo rassure : « L’hostilité des commentaires sur les réseaux sociaux n’est pas le reflet de ce que nous percevons dans la vraie vie, mais ils marquent une certaine incompréhension, car beaucoup de gens ne savent effectivement pas que de nombreuses personnes immunodéprimées, même lorsqu’elles sont multi-vaccinées, restent souvent vulnérables face au Covid. En effet, pour nombre d’entre elles, le taux d’anticorps n’atteint pas un niveau assez élevé pour les protéger. Ainsi une grande part des personnes en réanimation du fait du covid aujourd’hui sont des personnes immunodéprimées qui meurent bel et bien d’Omicron. ».

Pour Catherine Simonin, représentante des usagers, administratrice au sein de France Assos Santé et membre de la Ligue contre le cancer, sans empêcher tout le monde de reprendre une vie normale, il faut miser sur les gestes barrière désormais connus de tous, surtout lorsque l’on vit ou que l’on travaille dans l’entourage d’une personne fragile. Il est également important de prolonger en élargissant et pourquoi pas pérenniser l’accès aux masques FFP2 gratuitement pour les personnes les plus vulnérables (voir notre article sur la gratuité des masques FFP2), même si certaines personnes ont du mal à respirer avec ces masques plus filtrants. « L’important est d’être dans la bienfaisance et dans l’éthique du soin, et d’adapter les mesures en fonction du niveau de risque. On peut par exemple imaginer que dans une classe où il y a un enfant fragile, en intérieur, la classe garde le masque. En outre, si l’épidémie repartait, il faut pouvoir reprendre un bon niveau de respect des gestes barrière en population générale immédiatement. », commente Catherine Simonin.

Le niveau d’anxiété des malades chroniques reste élevé

Depuis presque 2 ans, dans le contexte de la crise sanitaire, l’étude Vivre-Covid19.fr, promue et créée par France Assos Santé recueille, chaque mois, le ressenti de plusieurs milliers de personnes malades chroniques et/ou en situation de handicap, en regard d’un groupe témoin de personnes bien portantes. Il en ressort que le niveau d’anxiété des personnes malades chroniques et/ou en situation de handicap et du groupe témoin sont assez proches ces deux dernières années, dans les périodes où les contaminations ont été fortes, comme la période de Noël 2020. Par ailleurs, alors que l’étude montre que le groupe témoin a bénéficié de moments de répit en termes d’anxiété, notamment durant l’été 2021, en revanche le niveau d’anxiété des personnes malades chroniques et/ou en situation de handicap n’a jamais baissé significativement au cours des 2 années passées et cette tendance semble se reproduire en Février et Mars 2022 alors que les mesures sanitaires s’allègent. Selon Hervé Servy, responsable de la mise en œuvre opérationnelle de l’étude pour la société de recherche clinique Sanoïa, il serait très intéressant de poursuivre cette étude au delà de mai 2022 afin de mesurer à quel point l’écart se creuse entre la baisse du niveau d’anxiété du groupe témoin, soulagé (à tort ou à raison) par la levée des restrictions sanitaires, et celui toujours très haut, voire croissant des personnes malades et/ou en situation de handicap dont on peut interpréter qu’ils continuent de se sentir en danger face à la Covid ; ou ressentent une anxiété en raison de la différentiation contrainte de leurs comportements sociaux. Le risque est que tout ceci participe à inciter les personnes les plus vulnérables à s’isoler, et que le simple fait de continuer à observer des mesures de bon sens pour sa propre santé, comme le port du masque en lieu fermé, soit perçu comme une forme de stigmatisation.

Un traitement prophylactique qui divise et n’atteint pas ses objectifs

Pour les personnes non ou faiblement répondantes à la vaccination, il existe un traitement prophylactique, c’est à dire préventif, contre le Covid, qui a été autorisé en accès précoce par la Haute Autorité de Santé. Renaloo regrette cependant que l’accès à ce traitement n’ait pas été facilité pour les personnes qui pourraient en bénéficier. Magali Leo explique : « On estime qu’environ 100 000 personnes immunodéprimées non protégées par le vaccin, sont éligibles à ce traitement prophylactique. Or, à ce jour, seules 16 000 d’entre elles l’ont reçu. L’inclusion des patients est en outre très disparate selon les régions (voir Le Point sur l’utilisation des traitements contre le Covid-19 disponibles en accès précoce de l’ANSM). Comment justifier de tels défauts et inégalités d’accès aux soins ? Les efforts ne sont pas assez marqués pour favoriser la prescription de ce traitement à laquelle de trop nombreux médecins s’opposent en se prévalant de leur liberté de prescription. Et dans le même temps, on permet de tomber le masque dans un contexte où la circulation du virus est encore intense. Alors que nous avons réussi à vacciner en quelques mois, à plusieurs reprises, des millions de personnes, organiser l’accès à ce traitement pour moins de 100 000 patients ne semble pas insurmontable. ».

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