Nombreuses sont les victimes d’amnésie traumatique et de violences sexuelles plus généralement, qui se voient poser de nombreux diagnostics et étiquettes qui ne leur parlent pas forcément car ne reflétant pas complètement leur histoire et leur souffrance. Beaucoup d’entre elles souffrent en fait d’un trauma complexe (différent d’un trouble de stress post-traumatique), un trouble qui n’est, selon nous, pas encore assez reconnu par les professionnels qui reçoivent les victimes en recherche de diagnostic. Pour vous aider à mieux comprendre ce trouble, son histoire, ses causes, ses manifestations et ses prises en charge, nous vous proposons donc un article sur ce thème. Vous trouverez en bibliographie différents livres et articles qui traitent de la question et qui ont permis d’écrire cet article, si vous souhaitez aller plus loin.

 Historique 

 Avant de parler du trauma complexe, il me semble important de revenir sur le diagnostic de syndrome de stress post-traumatique (ou état ESPT, ou trouble TSPT, selon les époques) avec lequel il est souvent « confondu ». Le diagnostic de syndrome de stress post-traumatique (SSPT) résulte de la clinique avec les vétérans. Ces hommes présentaient une pluralité de symptômes que les diagnostics établis ne suffisaient pas à englober. Les symptomes étaient donc pris séparément pour poser des diagnostics (alcoolisme, dépression, troubles de l’humeur, etc., par exemple) et par conséquent ne reflétaient pas véritablement leur vécu. Avec ces erreurs diagnostics, les traitements appliqués n’étaient donc pas efficaces, voire pouvaient aggraver leur situation. C’est donc face à ce vide diagnostic que le SSPT a été créé en 1980 et que des recherches ont pu être lancées, pour mieux comprendre ce syndrome et le prendre en charge.

Avec cette nouvelle entité nosographique, les professionnels du soin (psychiatres) ont pu se rendre compte que des patients victimes de violences (violences intrafamiliales, violences physique et sexuelle, etc.) présentaient les mêmes symptômes que ces vétérans. Toutefois comme pour les vétérans avant que le diagnostic de SSPT ne soit créé, ce diagnostic ne convenait pas parfaitement à tous, n’expliquant pas certains symptômes (dépression, anxiété, comportements à risques et auto-destructeurs, abus de substance, problèmes somatiques, problèmes relationnels, etc.), notamment pour les personnes victimes de violences dans l’enfance et de violences intrafamiliales (négligence, abandon, inceste…).

C’est pour pallier les manques du diagnostic de l’ESPT que le terme trauma complexe a vu le jour en 1992 grâce à Judith Hermann dans son livre Trauma and Recovery. Malgré sa pertinence, il n’a toutefois toujours pas de vraie place dans le DSM et n’est présent que comme une spécificité de l’ESPT, appelée DESNOS (disorders of extreme stress not otherwise specified) dans le DSM-IV ou avec l’ajout de critères dans le DSM-5 pour essayer de l’inclure sans pour autant le reconnaître comme un trouble à part entière, indépendant du trouble de stress post-traumatique. Il est toutefois désormais dans la CIM-11 (Classification Internationale des Maladies) sous SSPT complexe. Le DSM étant plus utilisé que la CIM en France pour poser des diagnostics, ce manque de reconnaissance contribue, à mon sens, à sa méconnaissance par les cliniciens et aux prises en charge inadaptées.

Définition et étiologie (cause)

 Le trauma complexe renvoie à un type de trauma en particulier : des événements traumatiques qui sont répétés, chroniques, sur une période de temps plus ou moins longue, souvent dans le cadre interpersonnel/familial. On peut y inclure : les violences sexuelles dans l’enfance, l’inceste, les violences domestiques, les violences intrafamilliales, le trafic humain, la prostitution, etc. Ces derniers sont d’autant plus déstructurants pour la victime, qu’ils surviennent précocement, sont répétés, et durent. Ils s’opposent ainsi aux événements du TSPT qui sont plus ponctuels, circonstanciés et plus facilement identifiables.

Alors que pour Hermann, la notion de répétition est une caractéristique essentielle du trauma complexe, d’autres professionnels tels que Bessel van der Kolk ou D.P. Brown & D.S. Elliott insistent sur le caractère précoce de l’événement et la perturbation de l’attachement comme facteurs prédisposant à l’émergence du trauma complexe. Bessel van der Kolk va jusqu’à proposer (mais cela sera refusé par l’American Psychological Association) le diagnostic de « trauma développemental » car cette notion met l’accent sur les perturbations développementales qui sont au centre du trauma complexe et ainsi, reflète mieux le trouble. En effet, les expériences de mauvais traitements vécus dans l’enfance interfèrent avec le développement normal des capacités du soi, c’est-à-dire la régulation émotionnelle, les habilités relationnelles et la cohésion identitaire, et ce notamment par la perturbation de l’attachement de l’enfant. Il est donc important de prendre en compte ces impacts sur le développement et cette perturbation de l’attachement pour pouvoir proposer un traitement efficace. Contrairement aux événements du TSPT, il ne s’agit pas ici de travailler seulement sur l’événement traumatique, mais également tout autour, sur ce qu’il s’est passé avant ayant contribué à l’émergence du trauma complexe (je développerai ce point plus loin).

 Critères diagnostics – symptômes du trauma complexe

 Il existe deux approches pour le diagnostic de trauma complexe : celle d’Hermann (1992) et celle de Roth et al. (1997). Les deux étant assez semblables, pour plus de clarté et pour que ce soit le plus complet possible, j’ai décidé de présenter ici une version combinée des deux. (Tarquinio, Houllé, et Tarquinio, 2017).

Les critères diagnostics du trauma complexe s’articulent autour de 7 dimensions principales :

1. Altération dans la régulation des affects :

– Dysphorie persistante

– Préoccupation suicidaire

– Autodestruction

– Modulation de la colère : colère explosive ou extrêmement inhibée (peut alterner)

– Difficulté dans la modalité sexuelle : sexualité compulsive ou extrêmement inhibée (peut alterner)

– Prise de risque excessive

2. Altération de la conscience :

– Amnésie ou hypermnésie des événements traumatiques

– Épisodes transitoires dissociatifs

– Dépersonnalisation1 / déréalisation

– Reviviscence des expériences (sous forme d’idées intrusives ou ruminations)

3. Altération de l’auto-perception :

– Sensation d’impuissance ou paralysie de l’initiative, inefficacité

– Honte, culpabilité et blâme de soi

– Sensation de différence complète par rapport aux autres / personne ne peut comprendre

– Minimisation (prétendre que tout va bien)

4. Altération dans la perception de l’auteur de l’agression3:

– Préoccupation dans les relations avec l’auteur de l’agression

– Attribution peu réaliste du pouvoir total de l’auteur de l’agression

– Idéalisation ou gratitude paradoxale

– Sensation d’une relation spéciale ou surnaturelle

– Acceptation du système de croyances ou de la rationalisation de l’auteur de l’agression

5. Altération dans les relations avec les autres :

– Isolement et repli

– Perturbation dans les relations intimes

– Recherches répétées d’un sauveur (pouvant alterner avec l’isolement et le repli)

– Incapacité à faire confiance

– Revictimisation

– Victimisation des autres

6. Altération dans le système de sens :

– Perte de confiance

– Sentiment d’impuissance ou de désespoir

– Perte des croyances antérieures

7. Somatisation :

– Système digestif

– Douleur chronique

– Symptômes cardio-pulmonaire

– Symptômes de conversion

– Symptômes sexuels

Il me semble important de préciser que le trauma complexe peut s’associer d’un trouble de stress post-traumatique, mais ce n’est pas systématique. Il est donc possible d’avoir un trauma complexe sans trouble de stress post-traumatique, ce qui montre bien que ces deux troubles sont différents avec des symptômes différents. Il est donc possible de ne pas se reconnaître dans les critères diagnostics du TSPT alors qu’on se retrouve pleinement dans ceux du trauma complexe.

1 La dépersonnalisation est le vécu subjectif de sentir que l’on perd le contrôle de la situation comme une perte de sens de soi-même. La personne a l’impression de sortir de son propre corps ; d’être là sans y être, comme si, subitement elle devenait spectatrice de ce qui lui arrive sans pouvoir intervenir dans l’ici et maintenant de la situation donc dans le réel. Elle est anesthésiée psychiquement comme physiquement, étrangère à elle-même. Elle peut être furtive (quelques secondes) ou s’inscrire dans le temps. (Romano & Bras, 2020)

2 La déréalisation est un vécu très particulier qui donne l’impression persistante (ou épisodique) que la réalité extérieure est étrange. C’est un symptôme qui peut être dû à un stress extrême comme une agression, mais aussi à la prise de produits toxiques, à un manque de sommeil ou à des pathologies graves. (Romano & Bras, 2020)

3 Dimension non requise pour poser le diagnostic puisqu’il peut y avoir des situations avec plusieurs auteurs, ou parce que la situation n’implique pas d’auteur identifiable.

 Pour aller plus loin – Modèles, théories et concepts

 Pour aller un peu plus loin dans la compréhension du trauma complexe et mieux comprendre la prise en charge nécessaire, je vous propose de passer en revue les modèles, théories et concepts en lien avec le trauma complexe, reprenant plus en détails ce que j’ai pu expliquer plus haut (Milot, Collin-Vézina et Godbout, 2018).

Les modèles psychodynamiques :

1) Théorie des relations d’objet : chez les enfants victimes de trauma complexe, des relations d’objet* dangereuses et étant sources de détresse seront intégrées. Cette rigidité des rôles inhibe la créativité, l’ouverture, la flexibilité psychorelationnelle, entrainant typiquement de la détresse psychologique et des relations interpersonnelles difficiles. * rapport qu’a l’enfant avec les personnes autour de lui

2) Compulsion de répétition : les trauma étant souvent sources d’incompréhension et d’impuissance intense, la répétition peut alors être pour les victimes une manière de donner un sens aux événements passés, de reprendre le contrôle ou de triompher des expériences aversives subies. Je précise que ces répétitions ne sont pas conscientes, et la victime ne les remarque pas forcément. Le travail thérapeutique servira notamment à identifier ces répétitions et à y mettre un terme.

3) Identification à l’agresseur : le survivant peut investir une identité d’« agresseur » afin de diminuer son sentiment d’impuissance et de vulnérabilité, d’éviter la re-victimisation ou de reprendre un certain contrôle ; ou l’enfant victime de trauma peut diriger la culpabilité non pas vers l’agresseur mais l’introjecter et l’intégrer à son concept de soi. De ce fait, il pourra maintenir une image positive de l’agresseur.

4) La mentalisation et les fonctions réflexives : dans le cas de trauma complexe, la mentalisation (capacité à comprendre ses états mentaux et ceux des autres, afin de mieux réguler ses émotions) devient un exercice menaçant. Son propre monde interne et celui du parent sont douloureux à explorer et tendent donc à être évités.

Les modèles psychodynamiques – développementaux :

1) Théorie de l’attachement : en cas d’abus ou de négligence parentale, l’enfant ne reçoit pas les soins adéquats et consistants dont il a besoin, ce qui ouvre la voie au développement de représentations négatives de soi ou des autres, et donc de représentations internalisées d’attachement insécurisant.

2) Théorie du trauma de trahison : cela fait référence à tout trauma impliquant une intention humaine malveillante et une violation de la confiance par une figure d’attachement (par exemple les parents, ou personne qui prend soin de la personne). En raison de l’importance des figures d’attachement pour assurer la survie de l’enfant, une trahison de leur part est profondément menaçante. Dans un tel cas, la dissociation, l’oubli ou le déni des traumas vécus deviennent des mécanismes de survie.

Les modèles sociaux-cognitifs :

1) Théorie de la sensibilisation aux conflits : les survivants de trauma deviennent non pas habitués ou imperméables à la violence, mais au contraire hypersensibles à la violence et vulnérables à réagir fortement aux conflits, ce qui augmente leur risque de dérèglement, de réaction dysfonctionnelle ou de dérégulation émotionnelle.

2) Théorie du traitement émotionnel : les traumas peuvent donner naissance à des structures de peurs, soit de chaines d’associations comprenant des stimuli, des réponses et des pensées liées aux traumas. Les survivants auraient tendance à développer des cognitions pathologiques négatives par rapport au monde (le monde est dangereux) et par rapport à eux-mêmes (je suis incompétent).

3) Modèle des dynamiques traumagéniques : ces traumas impliquent une dynamique de trahison, ce qui peut résulter en des croyances négatives et en une méfiance par rapport aux autres et aux relations intimes ; une dimension d’impuissance car les limites, les besoins et les demandes de l’enfant sont ignorés à répétition, ce qui altère la perception de contrôle qu’il peut avoir sur sa propre vie ; une stigmatisation qui mène à une faible estime de soi ; une sexualisation traumatique.

4) Concept de présence attentive : rester en contact avec sa propre expérience peut être particulièrement difficile pour les enfants victimes de trauma complexe, qui utilisent donc des stratégies d’évitement.

Les modèles neurobiologiques :

Ils rendent compte des effets des trauma complexe sur le développement du cerveau. Ces modèles suggèrent que le stress chronique causé par les trauma complexes tend à affecter la sécrétion de cortisol et d’autres hormones glucocorticoïdes. Les traumas dans l’enfance sont associés à une hypertrophie de l’hippocampe pouvant affecter les structures mnésiques et les traumas dans l’adolescence sont associés à l’hypertrophie du cortex frontal impliqué dans les fonctions cognitives supérieures telles que le raisonnement. On note aussi une hypertrophie de l’amygdale qu’importe si cela a eu lieu dans l’enfance ou l’adolescence. Ces trois structures jouent un rôle important dans la sensibilité au stress et dans la régulation des émotions, amenant une hypersensibilité au stress et une gestion du monde sur un mode de survie.

Le modèle intégratif :

Modèle de trauma au soi (Brière, 2002) : les expériences de mauvais traitement vécues durant l’enfance interfèrent avec le développement normal des capacités du soi dans trois principaux domaines.

a) La régulation émotionnelle : capacité à réguler et tolérer les émotions négatives intenses sans avoir recours à des stratégies d’évitement telles que la dissociation, l’automutilation ou l’abus de substance par exemple. Le modèle du trauma au soi suggère que les enfants victimes de trauma complexe font face à des défis insurmontables qui submergent leurs capacités, empêchant l’apprentissage par essai-erreur des stratégies adéquates d’auto-régulation.

b) Les habilités relationnelles : capacité à créer et maintenir des relations intimes significatives. Confrontés au trauma complexe, les enfants développeraient une image de soi et des autres négatives et seraient privés des apprentissages essentiels au bon fonctionnement des relations interpersonnelles, principalement en ce qui a trait aux habilités sociales et à la gestion de conflits.

c) La cohésion identitaire : capacité à maintenir un sens de soi cohérent. Vu le caractère dangereux de l’environnement des victimes de trauma complexe, il est adaptatif pour l’enfant d’être hypervigilant au monde externe dans le but de se protéger, au détriment d’un développement identitaire riche. De plus, puisque le monde interne devient douloureux ou empreint de détresse, l’enfant aurait tendance à éviter d’y porter attention. Ainsi, il n’aurait pas l’occasion d’explorer et de développer son identité de manière optimale.

 Prise en charge

 Le trauma complexe nécessite une prise en charge spécifique, différente de celle du TSPT. Comme je le mentionnais plus haut, les événements sources du trauma complexe sont pour beaucoup des événements ayant eu lieu précocement et par conséquent qui sont venus perturber ou interrompre le développement de la personne, à différents niveaux. Il y a donc toute une identité qui a été mise à mal à prendre en charge, contrairement aux événements du TSPT qui peuvent survenir sur une base identitaire et développementale solide. Même si les bases du trauma complexe sont dans l’enfance, le travail est possible avec les adultes et c’est d’ailleurs dans la majorité des cas les adultes qui consultent n’ayant pas été pris en charge à l’époque.

Le traitement est avant tout psychothérapeutique, mais une médication peut également être prescrite pour soulager de certains symptômes du trauma, de la dépression, de l’anxiété, etc. La prise de médicament peut également aider à stabiliser la personne pour pouvoir travailler en thérapie. Les victimes de trauma complexe présentant une multitude de symptômes et problématiques, l’approche thérapeutique doit être intégrative (multimodale, trans-théorique). Dans tous les cas, la thérapie sera plutôt longue, les problématiques présentées (déficits relationnels, cohérence du soi, etc.), demandant plus de temps.

Le traitement le plus utilisé dans la prise en charge du trauma complexe est le traitement en 3 phases :

1ère phase (la plus longue) : développer une alliance thérapeutique (relation de confiance et sécure entre le thérapeute et le patient) et renforcer le sentiment de sécurité, pour commencer à travailler sur l’attachement qui a été mis à mal. Le but durant cette phase est d’apprendre au patient à se stabiliser émotionnellement, à mieux gérer ses comportements auto-destructeurs / à risque, à développer des schémas de pensée plus adaptés, et travailler ses relations avec les autres, le tout en lui donnant des outils. C’est durant cette phrase qu’on prend le temps d’expliquer au patient ce qu’est une psychothérapie, le travail qui va être fait, ce qu’est le trauma, le trauma complexe, ses impacts et ses manifestations, etc. Cette phase est la plus importante et à elle seule peut résoudre beaucoup des problèmes et donner les outils nécessaires pour fonctionner au quotidien.

2nd phase : intégration de l’histoire traumatique pour se réapproprier son récit de vie et un sentiment de cohésion de soi. Cette phase est possible grâce à la phase 1 car le patient peut désormais mieux gérer ses émotions, de façon adaptée. Des techniques d’exposition ou de narration peuvent être utilisées (je pense notamment aux TCC, à l’EMDR ou encore à l’ICV). Le rôle du thérapeute est crucial durant cette phase car il doit rester toujours accordé émotionnellement au patient (l’accordage étant notamment ce qui a pu faire défaut dans l’enfance quand il y a un trauma complexe) et très contenant. En ce sens, il est essentiel que le thérapeute soit lui-même au clair avec ses problématiques, qu’il ait travaillé sur son attachement et sa régulation affective.

3e phase : travail autour de son rapport à soi et aux autres. Dans cette phase, on aide le patient à prendre conscience des outils qu’il a désormais à sa disposition, du travail qu’il a accompli durant les phases précédentes, de la securité qu’il peut désormais ressentir, de ses nouvelles compétences, pour l’aider à s’en saisir complètement et à avoir confiance en lui et ses capacités. En bref’, il s’agit de l’aider à retrouver une vie normale et fonctionnelle. Enfin, on l’aide à modifier ses relations dysfonctionnelles au profit de relations saines, en l’aidant à mettre en pratique tout ce qu’il a appris.

Durant ce traitement en 3 phases, diverses méthodes peuvent être utilisées telles que l’art, le théâtre, et des techniques plus corporelles telles que la méditation, la relaxation, le yoga, etc. Il est essentiel de ne pas oublier le corps tout au long de son travail. Les patients avec un trauma complexe ont souvent désinvesti leur corps, un corps souffrant, et il est essentiel de les aider à ressentir les tensions qu’ils peuvent vivre, sentir comment elles se manifestent mais aussi comment elles peuvent s’apaiser selon ce qu’ils font comme action, et à les décharger. C’est un travail différent, qui demande lui aussi de la patience et d’y aller doucement, mais qui est nécessaire.

 Conclusion

Le trauma complexe est un trouble, comme son nom l’indique, complexe, en ce sens qu’il est le résultat de différentes expériences ayant eu des impacts à différents niveaux et dont les repercusions sont multiples et touchent toutes les sphères de la vie (rapport à soi, rapport aux autres, rapport aux monde, rapport au corps et somatisation, gestion émotionnelle, etc.). Les recherches nous permettent aujourd’hui de mieux le comprendre, l’identifier et le prendre en charge, mais sa reconnaissance diagnostique reste encore trop faible au vu du nombre de victimes qui en souffrent. Par ailleurs, la place que prend le trouble de stress post-traumatique dans le DSM face au trauma complexe contribue à la minimisation des souffrances des victimes mais aussi de leur vécu. Toutes celles qui ne se retrouvent pas dans le TSPT ne correspondent pas au cas classique du trauma qui leur est présenté et la minimisation dont elles font déjà preuve n’en sera que renforcée, pouvant dès lors venir retarder leur prise en charge. Si jamais cela a été votre cas, si jamais vous vous reconnaissez dans le trauma complexe, vous n’êtes pas seul(e)s et des prises en charge sont possibles.

 Bibliographie

Bourgault, R. (2013). Trauma complexe ou DESNOS. Dans M. Kédia & A. Sabouraud-Séguin (dir). L’aide-mémoire en psychotraumatologie (p. 64-71). Dunod.  https://www.cairn.info/l-aide-memoire-de-psychotraumatologie–9782100593330-page-64.htm

Brown, D. P., et Elliott, D. S. (2016). Attachment disturbances in adults : Treatment for comprehensive repair. WW Norton & co.

Courtois, C. A. (2008). Complex trauma, complex reactions : assessment and treatment. Psychological trauma : theory, research, practice and policy, S(1), p. 86-100.

Milot, T., Collin-Vézina, D., et Godbout, N. (2018). Trauma complexe : Comprendre, évaluer et intervenir. Presses de l’Université du Québec.

Romano, H. et Bras, N. (2020). Amnésie Traumatique : des vies de l’ombre à la lumière. Amazon.

Tarquinio, C., Houllé, W.A., et Tarquinio, P. (2017). Discussion autour du traumatisme complexe : émergence du concept, étiologie et critères diagnostiques. Sexologies, 26(2), p. 79-86.

Van der Kolk, B. (2018). Le corps n’oublie rien. Albin-Michel.