Gare de Charonne (la Flèche d’Or)

La gare de Charonne est une gare de voyageurs et de marchandises de la Petite Ceinture ferroviaire de Paris. Inaugurée à partir de 1855, elle a été modernisée à plusieurs reprises. Elle se situe dans le 20e arrondissement. 

Fiche d’identité

Charonne : la gare la plus connue de la Petite Ceinture

La gare de Charonne est sans doute la plus connue de la Petite Ceinture, puisqu’elle accueille la Flèche d’Or, lieu culturel incontournable du 20e arrondissement. Elle doit son nom à la commune de Charonne, sur laquelle elle est située, et qui est annexée à Paris en 1860. 

À l’origine, la gare de Charonne est une gare de marchandises, située à 2 pas  de la gare d’Avron et de la gare de l’Avenue de Vincennes, le long des fortifications de Paris.

La gare voyageurs, quant à elle, se situe rue de Bagnolet, sur un axe très fréquenté. Le tunnel de Ménilmontant (ou de Charonne) débouche sur la gare. Long de 1301 m, il n’est autre que le plus long tunnel de la Petite Ceinture. Ce dernier passe au Nord-Est du cimetière du Père Lachaise, situé non loin de la gare, et mène à la gare de Ménilmontant.

Gare Charonne Petite Ceinture Paris
Un train spécial tracté par la locomotive 230 G 353 vient de dépasser la gare de Charonne. Crédit photo : Marc Debrincat

La gare Charonne se situe sur un territoire très densément peuplé, et qui demeure mal desservi par les transports en commun. Oubliée par le métro de Paris, la gare est fréquentée par différentes lignes de bus ; cependant, la station de métro la plus proche est située à plus de 800 mètres. Aussi, un transport ferroviaire viendrait (enfin) désenclaver ce quartier et offrirait une bien meilleure desserte du 20e arrondissement.

Ci-dessous, trois photos de la gare de Charonne capturées en juin 2020 par Jean-Nicolas Lehec

Charonne : une gare de voyageurs et de marchandises

La gare marchandises de Charonne ouvre ses portes le 15 septembre 1855. Il s’agit de la toute première gare de marchandises de la Petite Ceinture de Paris. Elle est rapidement suivie par la gare de marchandises de Belleville-Villette, ouverte le 15 juillet 1856.

La gare est très vite proche de l’asphyxie. En 1860, on comptait un total de 18334 expéditions et arrivages à la gare de Charonne. En 1868, ce nombre passe à 100396. Fin janvier 1866, une annexe charbons est créée, destinée principalement pour desservir l’usine à gaz de Saint-Mandé. La gare de Charonne fait l’objet de travaux d’agrandissement une première fois en 1870. Elle voit son profil modifié lors de la suppression des passages à niveau de la Petite Ceinture Rive Droite, en 1888.

Ci-dessous, trois photographies de la gare de Charonne-marchandises lors de la suppression des passages à niveau, capturées depuis la rue de Lagny les 14 mai 1888, le 23 août 1888 et le 15 février 1889. Source : Gallica

La première gare Charonne-Voyageurs est inaugurée en 1862. Elle se situe juste à côté de la gare de marchandises. Mais face à l’augmentation du trafic voyageurs, le Syndicat de Ceinture décide de déplacer la gare d’une centaine de mètres, lui faisant prendre son emplacement actuel. Les installations provisoires en bois sont seulement supprimées en 1878.

Afin d’améliorer la desserte de la Petite Ceinture pour l’Exposition universelle, la gare de Charonne-Voyageurs se dote (enfin) d’un véritable bâtiment en dur. Elle adopte l’architecture typique des gares de la PC Rive Droite : un bâtiment à‑cheval au-dessus des voies, flanqué de 2 escaliers menant aux quais. Le style architectural est très proche de celui de la gare de l’Avenue de Saint-Ouen, du Boulevard Ornano ou de la Chapelle-Saint-Denis.

La gare de Charonne-Voyageurs présente toutefois une particularité. Elle possède 2 voies à quai, mais aussi une voie centrale, qui permet aux trains de jonction de doubler (dans le sens Sud-Nord) les trains de voyageurs arrêtés en station. Cette 3e voie est inaugurée en marge de l’Exposition universelle de 1900.

Elle est arpentée par les grands express européens, comme le Train Bleu ou la Flèche d’Or, qui se dirigent vers la gare du Nord, depuis la gare de Lyon. Dans le sens Nord-Sud, une voie d’évitement est construite de la même façon à la hauteur de la gare d’Avron.

La gare de Charonne-Marchandises et la desserte des ateliers du métro de Paris

De son côté, la gare de Charonne-Marchandises est agrandie en 1908. À cette époque, elle est dotée d’une dizaine de voies, sans compter les voies perpendiculaires raccordées par des plaques tournantes. Pendant des décennies, la gare de Charonne est le terminus de trains de bois. Ces derniers fournissaient les ébénistes du quartier Saint-Antoine.

Gare Charonne-Marchandises Petite Ceinture
Carte des installations de Charonne-Marchandises en 1914. On notera la présence de la gare de la rue d’Avron, située sur la gauche. Coll. Pierre Tullin.

Notons aussi les ateliers de Charonne du métro de Paris (CMP, devenue la RATP en 1937). Ces derniers s’installent dès 1900 en face de la gare de Charonne-Marchandises, de l’autre côté de la Petite Ceinture. Ainsi, de nombreux trains du métro parisiens sont arrivés aux ateliers de Charonne via la Petite Ceinture, au moyen d’une rampe à très forte pente. Cette rampe est aujourd’hui disparue. 

Cependant, la Petite Ceinture continue de surplomber les ateliers de Charonne et le passage à niveau de la rue de Lagny

Motrice Sprague M.203 Ateliers Charonne
La motrice Sprague M.203 aux ateliers de Charonne, devant la rampe d’accès à la Petite Ceinture. Coll M. Hanquez, ADEMAS.

La revue le Génie Civil datée du 21 juillet 1900 décrit en détails les installations de l’atelier à l’occasion de l’inauguration de la ligne 1 du métro : 

La Compagnie du Métropolitain a établi, entre la rue des Maraîchers et le Chemin de fer de Ceinture, près de la station de la Porte de Vincennes, un dépôt de matériel auquel est adjoint un grand atelier de réparations actuellement presque terminé. Ce dépôt est relié au Chemin de fer de Ceinture par un raccordement qui permet d’y amener directement toutes montées les voitures du Métropolitain. 

L’article du Génie Poursuit en décrivant l’arrivée des motrices et le montage de leurs moteurs : 

Pour les dernières automotrices livrées, les moteurs n’ont été mis en place que dans ce dépôt. La figure 40 [voir ci-contre] montre le soulèvement, à l’aide de vérins, d’une caisse de ces automotrices pendant que l’on emmène son truck au point de l’atelier où il doit recevoir ses moteurs. 

Métro ligne 1 atelier Charonne
Vue d’un truck de voiture automotrice, prise au dépôt, le 4 juillet 1900. On distingue, à l’arrière-plan, la structure cylindrique de l’usine à gaz de Saint-Mandé, approvisionnée en charbon par la gare de Charonne. 

Ci-dessous, trois photographies des ateliers de Charonne du métro. Sur la 1e, une rame est retournée sur une plaque tournante, devant le talus de la Petite Ceinture. Sur la 3e, une rame Sprague passe sur le passage à niveau de la rue de Lagny, juste devant le bâtiment de l’octroi de la gare de Charonne-marchandises. Collection ADEMAS, tous droits réservés.

Le passage à niveau de la rue de Lagny, au pied de la Petite Ceinture, est d’ailleurs toujours actif. Il voit passer régulièrement les rames MF01 de la ligne 2 du métro, se dirigeant vers les ateliers de maintenance de Charonne. Ci-dessous, une vidéo capturée le 11 mai 2022 par @AAMmrvava : 

Que sont devenus les gares de Charonne-Voyageurs et Charonne-Marchandises ?

Malgré leur nom et leur (relative) proximité géographique, les gares de Charonne-Voyageurs et de Charonne-Marchandises ont connu un destin assez différent, comme nous allons le voir ensemble.

Création de la ZAC de Charonne en 1979

Dans les années 1970, des études domaniales amènent la SNCF à constater qu’elle a la possibilité de vendre certaines de ses emprises ferroviaires parisiennes, à la condition sine qua non de construire des installations équivalentes en banlieue.

Aussi, la SNCF décide d’abandonner la gare de Charonne-Marchandises. La Ville de Paris, intéressée par le terrain, cède à la SNCF les emprises de l’ancienne usine à gaz du Landy (Saint-Denis) pour reconstituer ses installations ferroviaires. Une ZAC (zone à construire) est donc décidée le 18 juin 1979, et la Ville rachète à la SNCF environ 36 000 mètres carrés de terrains. La ZAC « gare de Charonne » est ainsi déclarée d’utilité publique le 2 juin 1980. La Ville y construit notamment des logements sociaux à partir de 1981.

La gare de Charonne-marchandises peu de temps après sa démolition. À comparer avec la carte des installations ferroviaires en 1914 ci-dessus.
Crédit photo : APUR, revue Paris Projet n°21 – 22, janvier 1982.

De la gare de Charonne à la Flèche d’Or 

Après la fin du service de voyageurs, la gare continue de servir pour le service de messageries de la SNCF (Sernam). Elle voit aussi passer de nombreux trains de marchandises et des trains express européens.

La gare est également fréquentée par de nombreux trains spéciaux circulant sur la Petite Ceinture ferroviaire de Paris. Ils sont affrétés notamment par l’IFC, le COPEF et par notre association. 

Ci-dessous, trois photos d’un double autorail Caravelle affrété par le COPEF et notre association en 2003. Crédit photo : Bernard Chatreau.

Au milieu des années 1990, des étudiants des Beaux-Arts aménagent un café-concert dans le bâtiment voyageur : ils nomment l’endroit La Flèche d’Or. La gare devient l’un des lieux culturels les plus prisés de la capitale. Pete Doherty y organise notamment un concert en 1996. Plus récemment, ce sont Christine and The Queens ou encore Alex Beaupain qui s’y sont produits.

Ainsi, la Flèche d’Or préfigure les transformations que connaîtront plus tard certaines gares de la Petite Ceinture, transformés en lieux culturels et artistiques, à l’image de la Recyclerie, du Hasard Ludique ou de Poinçon.

La Flèche d’Or ferme ses portes définitivement en 2016. Elle est ensuite rachetée par le groupe Keys Asset Management en 2018. Enfin, en juillet 2020, le Conseil municipal du 20e arrondissement émet un vœu afin « que la Ville de paris fasse rapidement une offre d’achat de la Flèche d’Or au propriétaire Keys Asset Management ».

Un an plus tard, le 7 juillet 2021, la Mairie de Paris a annoncé en Conseil de Paris le rachat de la Flèche d’Or par la Ville. 

Depuis sa réouverture, le 16 septembre 2020 la gare accueille « un espace hybride entre café associatif, espace de travail collaboratif et lieu de création artisanale ou artistique et de programmation culturelle », d’après le descriptif du projet par 8 collectifs.

Notre association suivra donc de très près l’évolution de ce dossier, ainsi que les potentiels travaux qui se dérouleront au niveau du bâtiment voyageurs, des quais et des emprises ferroviaires de la gare.

Gare Charonne Petite Ceinture
Crédit photo : Nicolas Lelarge