Accueil

Société
Violences sexuelles dans le patinage français : 21 entraîneurs mis en cause, un phénomène "sans équivalent"
Plus d'une vingtaine d'entraîneurs mis en cause par le rapport de l'IGESR.

Violences sexuelles dans le patinage français : 21 entraîneurs mis en cause, un phénomène "sans équivalent"

Violences sexuelles

Par Angéline Guillin

Publié le

L’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche a annoncé ce mardi 4 août sa volonté de saisir la justice après avoir enquêté sur les abus et violences, notamment sexuels, dans le monde du patinage français.

Un nombre d’affaires rapportées "sans équivalent sur le plan international" : c'est l'accablante conclusion de la mission d'enquête sur les abus et violences, notamment sexuels, dans le monde du patinage français, transmise dans un communiqué du ministère des Sports de ce mardi 4 août. Lequel annonce la décision de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) de saisir la justice.

Le rapport de l'IGESR, dont le premier volet a été remis le 28 juillet dernier à Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale et à Roxana Maracineanu, ministre déléguée chargée des Sports, dénonce un fonctionnement ayant "favoriser une forme d'omerta" au sein de la Fédération française des sports de glace (FFSG).

Ce sont, au total, vingt-et-un entraîneurs qui sont mis en cause. Douze pour harcèlement et agressions sexuelles - dont trois avaient déjà été condamnés à des peines d’emprisonnement fermes ou assorties de sursis -, sept pour violences physiques ou verbales, et enfin deux autres qui sont décédés avant que les procédures engagées aient pu aller à leur terme. "Le volume des affaires ainsi identifiées est révélateur de pratiques et de comportements reproduits, qui ont traversé des générations d‘entraineurs", affirment les auteurs du rapport.

Signalements au parquet

Le début de l'année 2020 a été marqué par la volonté de briser l’omerta qui régnait dans le milieu du patinage français. En janvier, trois anciennes championnes, Hélène Godard, Anne Bruteneaux et Béatrice Dumour ont révélé à L'Equipe les abus sexuels commis par leurs entraîneurs alors qu’elles étaient mineures ; puis en février, Sarah Abitbol, dans son livre Un si long silence, accusait son ancien entraîneur, Gilles Beyer, de l’avoir violée entre ses 15 et 17 ans. Ce dernier fait toujours l'objet d'une enquête du parquet de Paris, notamment pour "viols".

"Ces différents dossiers ont d'ores et déjà donné lieu à deux signalements au procureur de la République au titre de l'article 40 du code de procédure pénale (février 2020), au placement en détention provisoire d'un entraîneur (février 2020) et à cinq mesures administratives d'interdiction d'exercer (avril 2020)", souligne le ministère. Dans un communiqué, les avocats de David Gailhaguet ont dénoncé la "partialité" de l'IGESR, déplorant que "l'ensemble des critiques se focalise de manière exclusive sur la personne de Monsieur Didier Gailhaguet".

L'IGESR pointe en outre "des difficultés réelles de fonctionnement de la direction technique nationale", un fonctionnement qui "est marqué par des cloisonnements et une forte concentration des pouvoirs", et "manquant de transparence". La FFSG, qui était alors sous la direction de David Gailhaguet, contraint de démissionné en février dernier, est ainsi accusée d’avoir garder le silence sur les agissements de ses entraîneurs, et évitant des "procédures disciplinaires, ou même de simples enquêtes" sur des violences et abus "pourtant dénoncés par les victimes". Les conclusions du rapport suggère également que les entraîneurs, en proie à "un véritable problème d’alcool", ont poussé à boire certains de leurs sportifs : "La consommation peut également relever d’une forme d’initiation précoce des jeunes athlètes" souligne ainsi le ministère.

"Plus de transparence"

Nathalie Péchalat, nommé en mars à la tête de la Fédération, assure auprès de nos confrères du Monde vouloir "introduire plus de transparence, plus d’honorabilité, plus d’éthique dans le fonctionnement de notre organisation", notamment en élaborant une charte éthique et de déontologie propre à la fédération des sports de glace.

Depuis ces révélations, la FFSG était depuis sous la menace du retrait de la délégation du ministère, arme absolue qui n'a pas été préconisée par les inspecteurs généraux dans leur rapport.

Votre abonnement nous engage

En vous abonnant, vous soutenez le projet de la rédaction de Marianne : un journalisme libre, ni partisan, ni pactisant, toujours engagé ; un journalisme à la fois critique et force de proposition.

Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne