« Il avait inventé une nouvelle façon de concevoir le marché de l’art, originale mais peu reproductible, tant elle tenait à sa personnalité chaleureuse comme à un sens de la prise de risque qui fut souvent couronné de succès », a écrit Harry Bellet dans les colonnes du « Monde » quelques jours après le décès du galeriste Enrico Navarra. L’analyse est juste car l’homme, sympathique, a su tout au long de sa carrière se lancer dans des projets monumentaux qui ont fait mouche.
Parti de la vente d’estampes au milieu des années 1970, Enrico Navarra (né en 1953) a ouvert sa galerie en 1989, rue du Faubourg Saint-Honoré, à Paris. L’année précédente, par l’entremise de l’avocat et collectionneur Pierre Hebey, il a rencontré l’œuvre de Jean-Michel Basquiat. Après la mort de celui-ci, il expose les œuvres qu’il a pu racheter. Puis, il publie un ouvrage monumental sur le travail de l’artiste américain, aide au montage d’une trentaine d’expositions sur lui. Il en sera de même pour les artistes chinois, indiens, brésiliens, thaïs et sur certains architectes comme Tadao Ando ou Jean Nouvel. « Publier des livres de référence à distribuer par le réseau est ma meilleure arme pour être au courant de tout, avant tout le monde », admettait Enrico Navarra.
Enrico Navarra (1953-2020)Ses enfants, son gendre et sa petite fille,Sa compagne et l’ensemble de sa famille,Tous…
Publiée par Galerie Enrico Navarra sur Jeudi 23 juillet 2020
Un marchand original
L’originalité de ce marchand, parfois colérique mais travailleur acharné, est de savoir recevoir ses collectionneurs français, américains ou asiatiques (il a été souvent défricheur en Chine). De sa galerie parisienne, il les invite l’été dans ses maisons du Muy, près de Saint-Tropez. Il monte des expositions en plein air avec des œuvres de Philippe Perrin ou de Bharti Kher, offre à ses clients ses grosses monographies et leur vend des œuvres XXL. Pour d’aussi gros projets, Enrico Navarra ne peut agir seul. Il constitue une équipe de fidèles, fait travailler des historiens de l’art et des journalistes, s’associe à des confrères étrangers comme José Mugrabi ou Tony Shafrazy. Un parcours étonnant, de courtier en lithographies à marchand d’Andy Warhol, Keith Haring, Jean-Michel Basquiat et Robert Rauschenberg.