Si la réduction du CO2 dans l'atmosphère occupe le devant de la scène, la lutte contre les émissions de méthane s'est progressivement imposée comme une mesure indispensable et prometteuse pour atteindre les objectifs de lutte contre le réchauffement climatique. Si la problématique émerge depuis seulement quelques années, des solutions accessibles existent déjà, mais nécessitent davantage de réglementations pour être appliquées.

C’était l’une des grandes annonces de la COP26. Plus de cent pays se sont engagés à réduire de 30% leurs émissions de méthane d’ici 2030 dans le cadre du Global Methane Plege. C’est "la première fois dans l’histoire récente qu’une COP accueille un événement majeur sur le méthane" a salué l’ONU sur son site internet. Quelques jours plus tôt, le G20, rassemblé fin octobre à Rome reconnaissait la "contribution significative" des émissions de méthane au réchauffement climatique et l’Union européenne et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) lançait l’Observatoire international des émissions de méthane.
La lutte contre les émissions de méthane s’accélère et s’est imposée comme une mesure essentielle pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C . Deuxième gaz à effet de serre derrière le dioxyde de carbone, le méthane a déjà contribué à une augmentation des températures de 0,5° C sur les 1,1°C de hausse par rapport à la période pré-industrielle, a alerté le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) dans son dernier rapport publié en août. Et ces émissions augmentent : elles ont grimpé de 9 % entre 2006 et 2017 selon le bilan mondial publié en juillet 2020 par le consortium Global Carbon Project.
Si le méthane occupe une place grandissante dans les politiques climatiques, c’est parce qu’il constitue un levier d’action efficace…. Et rapide. Le méthane est un gaz à effet serre 80 fois plus puissant que le CO2, qui ne reste que douze ans dans l’atmosphère, contrairement au dioxyde de carbone qui a une durée de vie d’une centaine d’années. "Réduire le méthane d’origine humaine de 45% cette décennie maintiendrait le réchauffement en dessous d’un seuil convenu par les dirigeants mondiaux" et "permettrait d’empêcher un réchauffement de 0.3 °C d’ici 2045" , expliquait l’ONU dans un rapport publié en mai 2021.

Efficace, rapide… et à faible coût


Aujourd’hui, 60% des émissions de méthane sont liées aux activités humaines, dont un tiers proviennent de l’élevage du bétail, liées à la fermentation dans les intestins des ruminants et l’épandage du fumier. Environ 22 % sont issues des fuites liées à l’extraction, l’exploitation et la distribution du gaz et du pétrole et 18 % proviennent de la décomposition des déchets.
"On a déjà la capacité de réduire les émissions de méthane de 30% sans un coût élevé, avec les technologies existantes, assure Rémi Prudhomme, chercheur au département Environnements et sociétés du CIRAD. Par exemple, dans le domaine de l’agriculture, il est possible de limiter facilement les émissions en utilisant des méthaniseurs, en réduisant la part d’herbe dans le régime alimentaire des ruminants, ou en utilisant des compléments alimentaires pour réduire la fermentation dans les intestins". Une étude publiée dans la revue Plos One en mars 2021 a démontré qu’introduire des algues dans le menu des vaches pouvait réduire de 80% leurs émissions de méthane. "Au-delà de ces solutions, il faut toucher au cheptel, c’est-à-dire au nombre de tête, ce qui est une question très délicate", admet le chercheur car cela implique une réduction de la consommation de viande et de produits laitiers.

Renforcer la législation


Du côté du secteur de l’énergie, lutter contre les émissions de méthane est aussi possible à faible coût. "Il suffit de détecter [les] fuites et de les reboucher, a précisé début novembre à France Info Kim O’Dowd, membre de l’ONG Environnement investigation agency. Ça peut être fait assez rapidement […]. Ce sont des choses qui sont déjà faites par les industries aujourd’hui, mais il n’y a aucune législation sur le sujet. Donc ces fuites continuent à émettre juste après avoir été détectées."
Le gouvernement américain a annoncé début novembre que des règles seraient prochainement mises en place pour lutter contre ces fuites sur les oléoducs et les gazoducs. Même son de cloche du côté de l’Union européenne. Le 25 novembre, le média Euractiv a dévoilé que la Commission préparait un texte visant à encadrer les émissions de méthane liées aux fuites sur les infrastructures et entend encourager les États membres à mettre en place des sanctions "efficaces, proportionnées et dissuasives ".
Pauline Fricot, @PaulineFricot 

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