18,42 milliards d’euros. C’est le montant colossal déposé par les Français sur les Livrets A et Livrets de développement durable et solidaire (LLDS) sur les quatre premiers mois de 2021, selon les derniers chiffres de la Caisse des dépôts. Le Livret A seul a attiré 14,93 milliards d’euros entre janvier et avril, mieux encore que sur la même période en 2020 (13,47 milliards) ! Des montants qui donnent le tournis, alors même que le livret préféré des Français et son petit frère le LDDS n’offrent qu’un rendement de 0,5% depuis le 1er février 2020. Si ce taux au ras des pâquerettes n’a pas freiné les épargnants, - bien au contraire -, c’est principalement parce qu’ils ont accumulé une “surépargne” impressionnante de 142 milliards d’euros entre janvier 2020 et mars 2021, selon la Banque de France. Une manne qu’ils ont souhaité orienter en majeure partie vers des produits sans risque, les comptes courants et les livrets d’épargne réglementée (Livret A, LDDS, PEL, etc.) en tête. Et ce, au grand dam de Bercy, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire répétant à l’envi que cette épargne doit être prioritairement fléchée vers l’investissement productif, à savoir dans les entreprises, et la consommation.

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Le retour de l’inflation

Or, comme le taux du Livret A est à son minimum légal (il ne peut descendre en dessous de 0,5%), il ne pourra que stagner ou augmenter au 1er août prochain, date de sa future revalorisation. D’ici là, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, qui doit émettre une recommandation sur le taux vers le 15 juillet, ainsi que Bruno Le Maire - qui est libre de suivre cet avis -, disposeront de l’inflation du mois de juin. Une donnée essentielle puisque le taux du Livret A est calculé à partir de “la moyenne semestrielle des taux à court terme en euros (€STR, taux auxquels se prêtent les banques, Ndlr)” et de la hausse des prix à la consommation (hors tabac) “mesurée par la moyenne semestrielle de la variation sur les douze derniers mois”, précise un arrêté publié au Journal officiel du 11 février 2021. L’inflation annuelle hors tabac du mois de mai s’affichant à 1,3%, après 1,1% en avril et 1% en mars, la tentation serait forte de croire à une hausse du taux du Livret A dans quelques semaines.

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Un rendement théorique de… 0,10%

Pourtant, “la question d’une hausse du taux ne se pose pas au 1er août” selon le directeur du Cercle de l’épargne, Philippe Crevel. Et pour cause, si on se penche sur la formule de calcul du Livret A, tout indique que le taux devrait rester à 0,5%. En effet, la moyenne semestrielle des taux €STR (taux interbancaires) oscille autour de -0,56% quand celle de l’inflation annuelle mesurée sur les 6 derniers mois atteint péniblement 0,8%. Il en ressort donc, à date, un taux de 0,12% ((0,8% - 0,56%)/2), arrondi au dixième de point le plus proche, soit de 0,10%. “Le plancher de 0,5% est une sécurité pour l’épargnant”, explique même l’économiste qui rappelle à titre de comparaison que “les livrets bancaires fiscalisés délivrent une rémunération moyenne de 0,10% selon la Banque de France”.

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Outre la formule de calcul, qui aboutirait donc à un taux inférieur à celui en vigueur depuis le 1er février 2020, la volonté du gouvernement ne plaide pas non plus pour une revalorisation. “Cela serait contradictoire avec la volonté de Bercy de pousser à la consommation”, appuie Philippe Crevel. “Nous attendrons les préconisations du gouverneur de la Banque de France”, assure de son côté Bercy à Capital. François Villeroy de Galhau peut en effet recommander de déroger à la formule de calcul en invoquant des “circonstances exceptionnelles”. Une latitude dont n’avaient pas profité les épargnants en février 2020. “Les prévisions d’inflation pour l’année 2020 ne laissent pas anticiper aujourd’hui de facteurs significatifs de hausse, et les taux d’intérêt monétaires eux-mêmes devraient rester durablement bas”, avait anticipé le gouverneur de la Banque de France pour écarter un coup de pouce au taux du Livret A lors de sa baisse de 0,75% à 0,5% le 15 janvier 2020. Et là encore, François Villeroy de Galhau ne devrait pas changer son fusil d’épaule selon Philippe Crevel : “Fidèle à son rôle, le gouverneur de la Banque de France dira qu’il n’y a pas lieu d’invoquer des circonstances exceptionnelles”, tranche l’économiste. Bercy suivrait alors sans broncher une recommandation visant à suivre à la lettre la formule de calcul et ainsi laisser le taux du Livret A à 0,5%. Alors même que l’inflation continue d’augmenter.

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Un rendement réel de -1% en 2021

Car plus que le rendement du Livret A, la hausse des prix affecte surtout la rémunération “réelle” du produit : en mai 2021, une inflation hors tabac de 1,3% équivaut ainsi à une rémunération nette d’inflation de -0,8% (0,5% - 1,3%). A l’inverse, sur l’année 2020, l’inflation étant nulle, le rendement réel du Livret s’affichait à 0,5%. Et la tendance ne devrait pas s’améliorer sur le reste de l’année. Selon les dernières projections macroéconomiques de la Banque de France publiées le 14 juin, “l’inflation totale s’élèverait à 1,5 % en moyenne annuelle en 2021”. Avec à la clé, donc, un rendement réel de -1% (0,5% - 1,5%) sur l’année entière.

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Encore une fois, même avec une inflation à de tels niveaux, la formule de calcul du taux du Livret A équivaudrait en janvier 2022 à un rendement de 0,5% (soit (1,5%+0,5%)/2), toujours avec l’hypothèse de taux interbancaires maintenus à -0,5%. En revanche, une hausse des prix supérieure pourrait pousser l’exécutif à agir sur cette rémunération : “Si l’inflation venait à dépasser 2% pendant six mois de suite, le gouvernement pourrait être sous pression, surtout à quelques mois de l’élection présidentielle”, glisse malicieusement Philippe Crevel. Un tel scénario pourrait alors le pousser à relever le taux à 0,75% au 1er février 2022. Mais pas avant…

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