SEXISME - "C'est lorsque j'ai commencé à mettre des mots dessus que je me suis rendue compte que la harcèlement de rue n'était pas quelque chose d'isolé, mais un vrai problème de société", explique Salomé Joly.
En 2014, pour passer son bac, en Suisse, elle doit produire un travail de maturité, l'équivalent des Travaux personnels encadrés en France. "Je voulais travailler sur quelque chose qui me tenait à cœur", raconte-t-elle au HuffPost. Trois ans plus tard, ce travail a débouché sur une bande dessinée, "Silencieuse(s)".
"Quand on a commencé à travailler sur le projet, à la mi-2015, mon éditeur n'avait jamais vraiment entendu parler de harcèlement de rue", poursuit la jeune auteure. Elle-même était surprise, lorsqu'elle a partagé pour la première fois ses questionnaires auprès de ses proches pour recueillir des témoignages, de voir à quel point ces pratiques étaient considérées comme banales. "C'est des petits actes qui peuvent paraître anodins, donc on n'en parle pas autour de nous. Par exemple, je ne vais pas dire à mon père quand je change d'itinéraire pour me sentir en sécurité..."
Au lycée, elle rassemble toutes ces histoires du quotidien pour en faire un journal intime d'une jeune fille fictive, Anaïs. Pour toucher un public plus large, son éditeur lui conseille de le transformer en bande-dessinée. Les témoignages sont adaptés en dessin par Sybilline Meynet.
La pénalisation doit servir à faire connaître la réalité du harcèlement
Pour Salomé Joly, tous ces actes, des remarques salaces aux attouchements, se transforment en harcèlement quand il n'y a plus d'échange entre les deux personnes. "A partir du moment où on ne veut pas entrer en contact et que l'autre continue, c'est du harcèlement", explique-t-elle. "Il ne faut pas arrêter la gentillesse, les compliments la séduction. Mais quand on nous répète douze fois la même chose dans la même journée, c'est beaucoup trop lourd."
"Il faut vraiment apprendre à tous à en prendre conscience: la majorité des hommes ne se rendent pas compte de ce que vit la moitié de la population." Sa bande-dessinée est un premier outil pour aider à prendre conscience de cette réalité, et briser les silences.
"Un garçon que je connaissais sur Genève, assez dragueur, avec peu de respect pour les filles, a été parmi les premiers à lire la BD, parce qu'elle avait été déposée là où il travaillait", illustre-t-elle. "Il était choqué, il ne se rendait pas compte des effets que ça pouvait avoir sur les filles, et s'est promis de changer."
Elle se félicite aussi des projets de pénalisation proposés en Suisse comme en France. Avant de tempérer rapidement: "la pénalisation n'est pas une solution, c'est un moyen pour poser les principes de ce que la société n'accepte pas". Une loi qui ne serait difficilement applicable, mais qui aide à faire bouger les mentalités.
Pour qu'une moitié de la population se sente enfin en sécurité dans les espaces publics.
Découvrez ci-dessous un des témoignages recueillis par Salomé Joly et publié dans "Silencieuse(s)":
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