Il a pris un peu de retard. Le projet de décret, censé imposer l’individualisation des frais de chauffage au sein des copropriétés, devrait, selon nos informations, être publié d’ici fin mai. Il faut dire que cette réforme, particulièrement complexe suscite de nombreuses oppositions. On fait le point sur les questions essentielles et les problèmes que rencontrent les copropriétés.

Pourquoi un telle loi et quel est son historique ?

Le projet est connu depuis 2015 déjà. Imposée par la nouvelle loi sur la transition énergétique, la réforme de l'individualisation des frais de chauffage part d’une idée simple : faire payer à chacun sa part de consommation, et ainsi faire disparaître les factures collectives adressées à l’ensemble des occupants de l’immeuble. Une mesure qui pourrait faire réaliser 15% d’économies pour chaque bien, selon la ministre de l’Ecologie de l’époque, Ségolène Royal. Pour cela, les 4,5 millions de copropriétaires concernés par la mesure devront équiper leur logement d’un compteur individuel d’énergie thermique (CET) capable de mesurer précisément leur consommation. Ségolène Royal, ne faisait alors qu’appliquer une directive du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relative à l'efficacité énergétique.

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Entre temps, la loi portant sur l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Elan), adoptée en octobre 2018, est venue confirmer ces objectifs, et vient même assouplir un point particulièrement sensible : le critère de la rentabilité économique. Point qui n’a pas été abordé par la loi de 2015.

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Ainsi, la loi Elan autorise les copropriétés, pour lesquelles l’installation de compteur n’est pas rentable ou techniquement impossible, à opter pour un répartiteur de frais : un outil moins coûteux, qui ne mesure pas la consommation mais qui prend simplement en compte la température moyenne relevée dans chaque logement. Un décret d’application qui précisera les contours de ce dispositif devrait même autoriser les copropriétés les moins énergivores à s’affranchir d’une quelconque installation, si et seulement si elles arrivent à prouver que l’installation des compteurs individuels ne sera pas une bonne affaire.

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Quelles copropriétés seront concernées et dans quels délais ?

Toutes les copropriétés ne seront pas concernées par ces nouvelles obligations. A l’origine seules celles consommant en moyenne jusqu'à 50 kilowatts-heure par mètre carré étaient exemptées d’installation de ces nouveaux outils. A la suite des consultations avec les associations et organismes, ce seuil a été relevé à 80 kWh/m2. Cas particulier : les copropriétés consommant entre 80 et 120 kWh/m2ont obtenu un délai supplémentaire pour se mettre en règle. La date limite est fixée au 25 octobre 2020 au lieu du 31 mars 2019. Elles ne disposeront cependant d'aucune exemption. Elles seront donc soumises à la pose des compteurs, quel que soit l'intérêt économique pour elles, assure le ministère de la Cohésion des territoires.

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Toutes celles au dessus du seuil de 80 kWh/m2 devront donc s’y astreindre sans condition. Acté depuis la loi de 2015, le calendrier de mise en conformité a fixé plusieurs dates-butoirs selon le type de copropriété :

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  • le 31 mars 2017 pour les copropriétés dont la consommation moyenne est supérieure à 150 kWh/m2
  • Le 31 décembre 2017 pour celles consommant en moyenne entre 120 et 150 kWh/m2.
  • Enfin, le 25 octobre 2020 pour celles consommant entre 80 et 120 kWh/m2.

Réclamé par les associations prenant part aux consultations sur le projet de décret, l'idée d'un changement de date-butoir pour les copropriétés consommant plus de 120 kWh/m2 a été écartée par le gouvernement. Aucun délai supplémentaire ne leur sera accordé.

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Les outils de mesures sont-ils fiables et rentables ?

Comme dit précédemment, lorsqu’une copropriété estime que l’installation d’un compteur individuel pour chaque logement n’est pas rentable économiquement - c’est-à-dire que les gains générés par les économies d’énergie ne seront pas suffisants au regard du coût d’installation - ou que la mise en place d’un tel compteur est techniquement impossible, la loi Elan ouvre la voie à un deuxième type appareil : le répartiteur de frais de chauffage (RFC).

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Problème : contrairement au compteur individuel, dont la fiabilité ne souffre d’aucune contestation, le RFC est plus que décrié. Selon l’Association des responsables de copropriétés (ARC), de nombreuses copropriétés précédemment équipées ont rencontré des problèmes de fiabilité, d'entretien et de réactivité des prestataires. De son côté, Enertech, un organisme spécialisé dans la performance énergétique du bâtiment, assure que cet instrument de mesure “ne peut raisonnablement pas être considéré comme un moyen fiable de détermination de la quantité fournie”. En cumulant plusieurs erreurs (mauvais paramétrage mais aussi mauvais positionnement) Enertech évalue la surestimation des consommations des RFC entre 69% et 86 % ! Pourquoi de tels écarts avec le compteur individuel ? Car le répartiteur ne fait que calculer non pas l'énergie dépensée, mais uniquement la température ambiante dans les différents logements. Or de nombreux facteurs distincts de la consommation peuvent réchauffer ou refroidir un bien (isolation, orientation du bien etc.).

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Et si la copropriété ne peut ni installer de compteur, ni de répartiteur pour des raisons techniques ?

Dans ce cas, elle pourra, d’après le projet de décret de la loi Elan, opter pour des “méthodes de substitution permettant de mesurer la consommation de chaleur à moindres coûts”, sans plus de précisions. ”A ce stade, ce troisième type d’outil n’existe pas. Rien n’est prévu côté du Laboratoire National de Métrologie et d’Essai, qui certifie et autorise la mise sur le marché des instruments de mesure”, explique le syndicat de la Mesure, qui rassemble les professionnels du secteur. Selon l’entreprise Kocliko qui propose des solutions connectées pour optimiser la performance énergétique des bâtiments elles pourraient prendre la forme d’un robinet thermostatique, plus précis qu’un RFC, qui fait également office de répartiteur.

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Quel coût pour chaque outil ?

Selon le syndicat de la Mesure, un répartiteur coûte en moyenne entre 4 et 8 euros par an selon taille de la copropriété (privée ou sociale) contre 48 euros par an pour un compteur. Dans les deux cas, le coût d’entretien est compris. Pour un logement de 78 mètres carrés, il faut compter environ 5 répartiteurs soit, si on prend une moyenne de 6 euros par unité, un coût moyen annuel de 30 euros pour l'option des répartiteurs, contre 48 euros pour les compteurs. Quand aux économies pouvant être obtenues, elles sont incertaines car l’individualisation n’est que partielle comme le rappelle Le Monde : “Elle ne concerne pas les frais fixes de chauffage (entretien de la chaufferie), qui peuvent représenter 50% de la facture”

Combien de copropriétés sont déjà équipées et quelles sanctions ?

Selon le syndicat de la Mesure, seuls 800 000 logements sont équipés d’un de ces deux outils ou en cours d’équipements. Bien loin des près de 3,4 millions de logement énergivores qui devraient déjà être équipés s’ils avaient respectés les dates-butoirs du 31 mars 2017 et 31 décembre 2017. Et selon l’ARC, il n'y a pas encore eu de mise en oeuvre de la sanction de 1.500 euros par logement et par an, comme prévue par la loi.

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