Les artistes jouent avec le hasard à la Vieille Charité de Marseille
Ville de passage des surréalistes, Marseille se devait d’analyser comment les artistes du XXe et du XXIe siècles ont joué avec le hasard dans leurs œuvres. Qu’il soit aléatoire ou dirigé, celui-ci permet davantage de liberté formelle et de contenu. La Vieille Charité et la Friche de mai se sont associées pour cette belle performance.
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De Hugo à Richter
La pluie (1969) de Marcel Broodthaers, présentée dans l’exposition « Par hasard », Vieille Charité, Marseille, 2019 (©Guy Boyer).
Des paysages à l’encre de Victor Hugo au damier coloré de Gerhard Richter, l’exposition de la Vieille Charité propose un parcours plutôt chronologique. « L’accidentel, l’aléatoire, la trouvaille vertueuse, les sculptures involontaires, les coulures, les compressions font émerger un répertoire de formes libres menant au sublime dans l’incertitude du geste », explique Guillaume Theulière, le commissaire général de cette exposition s’ouvrant sur le film du Belge Marcel Broodthaers. Ici, l’artiste tente d’écrire sous la pluie alors que celle-ci transforme son texte en dessin abstrait.
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La figure tutélaire de Mallarmé
Tête d’enfant avec un arc-en-ciel et Femme de profil vers la gauche (1898) d’Odilon Redon et livre Un coup de dés de Stéphane Mallarmé, présentés dans l’exposition « Par hasard », Vieille Charité, Marseille, 2019 (©Guy Boyer).
C’est en 1897 que Stéphane Mallarmé publie Un coup de dés jamais n’abolira le hasard, grâce à l’aide du marchand Ambroise Vollard. Celui-ci propose de l’illustrer de gravures dont ces deux planches d’Odilon Redon mais le projet ne verra pas le jour. L’étrangeté des dessins de Redon correspond au caractère énigmatique du poème de Mallarmé.
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Avec Marcel Duchamp et Man Ray
3 Stoppages-étalon (1913-1964) de Marcel Duchamp et Rayogrammes (1923-1959) de Man Ray, présentés dans l’exposition « Par hasard », Vieille Charité, Marseille, 2019 (©Guy Boyer).
Photographies et ready-made rappellent l’importance du hasard dans le travail des deux amis Marcel Duchamp et Man Ray (dont une exposition sur ses liens avec la mode se tient jusqu’au 8 mars). On y retrouve aussi bien les rayogrammes, ces empreintes d’objets placés directement au contact du papier sensible, que des sculptures comme 3 Stoppages-étalon, réalisé à partir de trois fils tombés sur le sol et dont Duchamp reprend les lignes aléatoires pour créer des règles en bois.
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Beaux ensembles modernes
Sculpture automatique (1938) et Papiers déchirés (1932) de Jean Arp, présentés dans l’exposition « Par hasard », Vieille Charité, Marseille, 2019 (©Guy Boyer).
Le parcours de l’exposition de la Vieille Charité est marqué par de beaux ensembles d’œuvres d’artistes modernes tels que Kurt Schwitters, Max Ernst et Jean Arp. Les dessins déchirés et jetés au sol par ce dernier sont ensuite recollés soigneusement en respectant le hasard de leur chute. De l’accidentel, Arp passe à un aléatoire codifié en peignant, par exemple, systématiquement les plis d’un papier froissé.
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Détour par les Nouveaux Réalistes
De gauche à droite : Poubelle organique (1970) d’Arman, Béquille nature morte (1971), Tableau-piège (1968), Foire aux puces (1975) de Daniel Spoerri et Expansion contrôlée (1967) et Compression carton (1976) de César, présentés dans l’exposition « Par hasard », Vieille Charité, Marseille, 2019 (©Guy Boyer).
En récupérant des objets de rebut et en les exposant tels quels, les Nouveaux Réalistes mettent à nouveau en œuvre le hasard qui leur fait trouver ces ready-made mais ils choisissent ce qu’ils veulent utiliser. Des affiches de Raymond Hains et Jacques Villeglé aux Tables redressées par Daniel Spoerri et transformées en natures mortes d’un quotidien contemporain.
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Un final de toute beauté
Eins. Un. One… (1984) de Robert Filliou et 4900 Farben (2007) de Gerhard Richter, présentés dans l’exposition « Par hasard », Vieille Charité, Marseille, 2019 (©Guy Boyer).
Qu’elle merveilleuse idée que d’avoir associé l’installation de Robert Filliou (16 000 dés dont les faces représentent toutes le chiffre 1 et jetés au sol de manière aléatoire) à l’immense peinture de Gerhard Richter (un nuancier dont les couleurs industrielles empruntées aux fabricants de peinture sont placées par un programme informatique) ! Le résultat est bluffant.
