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Stéphane Bourgoin serial menteur ? Dans Match, il passe aux aveux

Stéphane Bourgoin
Stéphane Bourgoin © DAVID BETZINGER / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP
Emilie Lanez , Mis à jour le

Depuis 30 ans, soi-disant formé par le FBI, c’était l’expert reconnu des tueurs en série. Aujourd’hui, ses mensonges et ses plagiats sont démasqués. Il passe aux aveux dans Match

Sa première fois. Californie, 1979. Stéphane Bourgoin a 26 ans ; il boutonne sa chemise jusqu’au cou, porte des boucles brunes et, derrière ses lunettes en métal, a déjà le regard gentil, légèrement étonné, qu’il aura toujours quatre décennies plus tard. Pour ces quelques minutes dans le couloir de la mort, le Frenchie a ferraillé dur. Il a écrit aux établissements pénitentiaires, les a relancés, a encaissé des refus. Mais cette fois, enfin, il le tient : son premier serial killer. Richard Chase, six meurtres, l’homme qui se régalait de sang d’oiseau. Un carnet de notes sur les genoux, Bourgoin le questionne, dodelinant de la tête. Le condamné Chase, croyant au pouvoir rédempteur de la vitamine C, dormait la tête encerclée d’oranges. Il s’injectait aussi du sang de lapin dans les veines et dégustait les viscères de ses victimes mélangés à du Coca et du yaourt. Bourgoin l’écoute, ne tourne pas de l’œil. Il ne tremble pas. Il est concentré. Sa première fois…

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Des serial killers, il sait tout. Depuis quarante ans, il enchaîne à leur propos conférences, publications (34 livres en comptant les rééditions, traduits en onze langues), tournages de documentaires, colloques, séminaires et émissions. Oh ! certes, il n’a aucun diplôme, n’a rien étudié à l’université ; mais, comme il le murmure à ses auditoires, notre spécialiste national du crime, l’as des as du profiling, a été formé par le FBI, a enseigné à la Gendarmerie nationale et à l’Administration pénitentiaire, a formé des magistrats, a tuyauté des policiers, a élucidé des enquêtes en Afrique du Sud et questionné des meurtriers jusqu’en Allemagne. Il brandit ce chiffre magique : « J’ai rencontré 77 serial killers. » Soixante-dix-sept meurtriers dont il connaît l’enfance, le parcours scolaire, la sexualité, la santé, la religion, l’alimentation, le sommeil. Infaillible, hypermnésique, une banque de données vivante. Bourgoin fait profession de sa connaissance phénoménale des criminels sadiques.

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Mes mensonges me pèsent 

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En cette fin de printemps 2020, son agenda n’attendait que la fin du confinement pour se déployer. Un nouveau livre chez Grasset, une collection de trente albums de bandes dessinées chez Glénat, une tournée de conférences payantes dans tout le pays. Mais, en janvier dernier, 4ème Œil Corporation, un groupe anonyme de huit « passionnés d’affaires criminelles », comme il se présente, a mis en ligne, sur You Tube, neuf vidéos démontrant ses mensonges et ses plagiats. « Nous voulons qu’il arrête de se faire de l’argent en racontant des fadaises sur la mort de personnes réelles », explique une de ses membres, Maât, pseudonyme emprunté à la déesse égyptienne de la Justice. Bourgoin a refusé de répondre à ses détracteurs masqués, mais leurs vidéos troublent. Bourgoin, un serial menteur ? Le mythomane du crime ? Un imposteur qui aurait berné la presse, la justice, la gendarmerie, la magistrature et la police ?

Ayant déménagé cet hiver dans le village de l’ouest de la France où réside Christelle, sa compagne, Stéphane Bourgoin trie depuis lors ses 20 000 DVD et ses dizaines de cartons d’archives, de dessins, de scripts, de classeurs. Il range et il vacille. « J’ai retrouvé les lettres que j’écrivais à 18 ans à mes parents. Je les décevais tellement ! Je ne menais pas l’existence qu’ils attendaient », dit-il de sa voix mécaniquement douce. Acculé par ses accusateurs internautes, vilipendé sur les réseaux sociaux, le sexagénaire réalise qu’il ne peut plus échapper à une confrontation avec le réel. « J’arrive à l’heure du bilan, mes mensonges me pèsent », souffle-t-il. Ensemble, jour après jour, nous avons patiemment déroulé le fil, tentant de distinguer le vrai du faux dans le méli-mélo de ses déclarations.

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Parcours escarpé, durant lequel Stéphane Bourgoin coopère, pleure, se ravise, tergiverse, ment un peu, se corrige puis tente un dernier petit mensonge. Force de l’habitude ou jouissance triste d’un homme habitué à berner ? A force d’étudier des gars qui vénèrent les oranges ou dévorent des nourrissons, comment se contenter d’un quotidien raisonnable ? Sait-il encore reconnaître la vérité, lui qui vit depuis si longtemps englué dans le brouillard de sa propre légende ?

Dès qu’il prend la parole en public, on lui pose la question. Pourquoi consacrer sa carrière à ces pervers ?

En 1979, quand Bourgoin rencontre Richard Chase, il vit depuis trois ans aux Etats-Unis. Il a quitté ses parents et la Mobylette sur laquelle il parcourait Paris, enchaînant cinq séances quotidiennes de cinéma. Viré de trois lycées, il fuit le silence désappointé de son père, Jean Bourgoin, fils d’ouvriers et polytechnicien, marié en troisièmes noces à Franziska, une Allemande. Stéphane est leur unique enfant, un miracle né alors que sa mère a dépassé les 50 ans. Hélas, il arrive que même les miracles déçoivent. Le jeune homme, qui partage un minuscule appartement au 11e étage d’un immeuble de la 155e Rue de New York, gagne sa vie comme assistant-réalisateur sur des tournages de films X ou de série B. Cinq ans après Richard Chase, il rencontre Ed Kemper à la prison de Vacaville, où il reviendra, en 1991, le filmer pour FR3. Comme ce n’est pas tous les jours qu’on peut voir, calé dans son canapé, un Français confesser un colosse qui a joué aux fléchettes avec la tête de sa mère posée sur la cheminée, l’auteur de ce document télévisuel devient un phénomène.

Dès qu’il prend la parole en public, on lui pose la question. Pourquoi consacrer sa carrière à ces pervers ? Dix fois, vingt fois, cent fois, il a raconté ce traumatisme, cette cruauté du destin. Sa « première compagne », sa « femme » ou sa « petite amie » – les versions varient – a été assassinée. Parfois, il rajoute « étranglée », « tuée, violée, découpée en morceaux », ou « presque décapitée », ou encore « éviscérée ». Il aurait découvert le crime en rentrant à leur domicile, aurait alors prévenu la police, et les enquêteurs l’auraient tenu au courant de leurs investigations. Un jour, ils l’auraient informé qu’ils avaient arrêté le coupable. Là, raconte-t-il, « j’écume tous les ouvrages de la librairie du Congrès, à Washington, et de la bibliothèque universitaire de Stanford, et je découvre qu’il n’existe aucun ouvrage sur ces meurtriers. Il me fallait aller à la source, comme une catharsis ». Ce premier amour assassiné, Bourgoin l’appelle « Eileen » et situe les faits à Los Angeles. « J’ai changé le nom et le lieu par respect pour sa mémoire », nous avoue-t-il dans un premier temps. En réalité, Bourgoin a inventé l’histoire et, la gorge nouée, nous la raconte.

Son premier mensonge est efficace. Il justifie son étrange monomanie pour les criminels en série

Le jeune Français a pris l’habitude de fuir les hivers new-yorkais en Floride. Il se promène à Daytona Beach, quartier miteux où les motels louches somnolent entre Atlantic Avenue et Ocean Boulevard. Au bar PG’s, l’apprenti réalisateur de films X observe une barmaid, Susan Bickrest. Elle a 24 ans, elle a grandi dans l’Ohio et, pour financer sa formation d’esthéticienne, elle arrondit son salaire en se prostituant. Stéphane Bourgoin et elle se voient « quatre ou cinq fois ». En décembre 1975, il revient au PG’s. Susan n’est plus là. On a retrouvé son corps flottant dans l’étang de Spruce Spring Creek. « J’ai commencé à lire, j’ai fait des recherches, c’est devenu une passion. » Admettons. Mais pourquoi avoir transformé la barmaid prostituée de Floride, en Eileen, l’épouse de Californie ? Pourquoi avoir ajouté tant de détails macabres ? « Je ne voulais pas qu’on sache que je la dépannais financièrement », confesse-t-il au prix d’un ultime arrangement sémantique pour masquer le fait – banal dans la littérature de genre – qu’il serait tombé amoureux d’une pute blonde aux cheveux courts.

Son premier mensonge est efficace. Il justifie son étrange monomanie pour les criminels en série, émeut l’auditoire et, comme nul n’aurait l’indécence d’aller vérifier ce tragique chagrin, permet à Bourgoin de continuer en citant çà et là la mémoire de sa chère Eileen. En mai 2005, un magazine publiera même la photo de celle-ci embrassant son amoureux parisien. Vertigineux quand on découvre qu’Eileen n’existe pas ! Mais cette Susan, dont l’assassinat est documenté, a-t-elle vraiment été son amante ? Prudemment, on lui pose plusieurs fois la question. Il répond par l’affirmative, jure qu’il dit la vérité. Va pour Susan.

Stéphane Bourgoin renâcle à admettre n’avoir pas été l’élève du FBI

Dans la carrière de Bourgoin, il n’y a pas que la fiancée américaine qui revient, en boucle, émouvoir la galerie. Il y a également le sigle du FBI, scintillant comme un gyrophare sur son CV. Combien de fois s’est-il targué d’avoir « suivi deux formations de six mois » à Quantico, académie de formation des agents du Federal Bureau of Investigation ? Un privilège exceptionnellement accordé à un non-Américain, de surcroît non officier de police. Le Français a multiplié les explications. La plus fréquente serait qu’il aurait envoyé par la poste des extraits de ses vidéos de serial killers à l’académie de police, qui, pour le remercier, l’aurait autorisé à bénéficier d’une formation de profiler. Une autre version, plus rare, se réfère à l’amitié qui l’aurait lié au grand romancier Robert Bloch, l’auteur de « Psychose », dont il fut le traducteur. Bouleversé par la mort de sa petite amie américaine, Bloch lui aurait présenté des amis dans la police, et, de fil en aiguille, Bourgoin aurait été formé au FBI. Lors de nos conversations, il a raconté successivement ces deux versions. Dans la seconde, il convient de remarquer que le premier mensonge fonde le deuxième, et ça donne le tournis.

Désormais retraité, l’Américain John Douglas est reconnu comme l’inventeur du profilage criminel. Il a traqué les tueurs en série pour le FBI, où il s’est engagé en 1970. Ses deux livres autobiographiques ont inspiré la série Netflix « Mindhunter ». John Douglas s’agace de découvrir les trucages du Français. « Ni moi ni personne de mon unité n’a jamais entendu parler de ce personnage. Nous avons formé des officiers de police d’Australie, du Canada, d’Angleterre et des Pays-Bas, mais jamais aucun Français. Et encore moins un simple civil. » Stéphane Bourgoin renâcle à admettre n’avoir pas été l’élève du FBI. Puis, apprenant que John Douglas nous a répondu, il reconnaît n’avoir filmé qu’une fois « cinq minutes d’une réunion de travail ». Dans un ultime baroud, il présente une lettre, manuscrite et non datée, adressée à son fils. Les trois signataires lui souhaitent une bonne scolarité et espèrent avoir, un jour, le plaisir de faire sa connaissance. La missive porte le signe magique bleu du FBI.

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Quand Bourgoin dit qu’il était sur la scène du crime avec les cadavres décomposés, il ment. C’est à moi que c’est arrivé. Il me vole ma vie

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Dans le dédale de ses hauts faits, il convient de s’arrêter un instant en Afrique du Sud. Lors d’au moins deux émissions de radio filmées et au cours d’une conférence, le 27 novembre 2018, devant les étudiants des métiers du livre de l’IUT Charlemagne à Nancy, Bourgoin affirme avoir fait avouer un meurtrier nécrophile et cannibale, Stewart Wilken. « J’ai choisi une pièce assez petite, claustrophobique, et j’ai demandé aux enquêteurs de me donner des photos de leurs enfants. J’en ai tapissé les murs pour le faire craquer. » Sa technique aurait fonctionné : « Il m’avoue avoir tué sa propre fille. » Ce n’est pas tout. « En décembre 1999, j’étais en Afrique du Sud. Il était minuit, dans les bois de Port Elizabeth, le cimetière de l’assassin. Celui-ci me dit venir ici violer le corps de ses victimes et me raconte fourrer du papier journal dans leurs fesses pour éviter les asticots sur son sexe. » Or, en 1999, Wilken est incarcéré depuis deux ans. Devant les étudiants nancéens, Bourgoin ajoute qu’il a été aspergé de débris de cadavres en décomposition, après l’appel d’air provoqué par un hélicoptère se posant à proximité du charnier. « Or, dans le désert, pas moyen de se laver », conclut-il, fataliste. L’auditoire frémit tandis que lui, à son habitude, sourit doucement.

Micki Pistorius, profileuse d’Afrique du Sud, qui démissionna en 2000 de la police, est à l’origine de l’arrestation de Wilken. C’est le sergent Derick Norsworthy, son adjoint, qui a obtenu les aveux de Wilken, ayant eu lui l’idée de tapisser la salle de photos d’enfants. « J’ai rencontré Bourgoin lors d’un colloque en France, en 1998. Il est venu me voir pour un documentaire du 22 février au 7 mars 1999. A cette époque, Stewart Wilken était en prison. Il ne l’a jamais vu, ne lui a jamais parlé. Quand Bourgoin dit qu’il était sur la scène du crime avec les cadavres décomposés, il ment. C’est à moi que c’est arrivé. Il me vole ma vie. Jamais la police sud-africaine n’aurait autorisé un inconnu à venir sur une scène de crime et à s’entretenir avec un suspect. » Quand on rapporte cette conversation à Stéphane Bourgoin, celui-ci bafouille. « Oui, la scène d’hélicoptère est empruntée à Pistorius. J’ai exagéré, j’amplifie quand je suis face à un public. »

« J’ai exagéré mon importance, j’ai parfois dit des conneries, confesse-t-il

Sur sa page Facebook, qui a compté jusqu’à 50 000 abonnés, Bourgoin a beaucoup « amplifié ». A l’automne 2015, il publie un livre, « Sex Beast », la biographie de Gerard Schaefer, un policier condamné pour le meurtre de 34 femmes en Floride. Afin de promouvoir l’ouvrage, il annonce sur son site une conférence qu’il donnera le 14 novembre dans une médiathèque de Lens. « J’offrirai à tous les acheteurs de mon livre un petit morceau de Schaefer, ongles, cheveux, oreille, rotule, peau, ossements », écrit-il. Ses admirateurs s’étonnent qu’il possède de tels restes funéraires. Bourgoin répond qu’il les a reçus avec l’urne, ainsi que le poignard nazi dont le meurtrier se servait pour torturer ses victimes sur un arbre dont il a également récupéré des débris. Le tout serait rangé dans sa cave. Et de renchérir : il envisage de se faire coudre des chaussures avec la peau de Schaefer, et a aussi songé à un porte-monnaie en cuir de son scrotum, mais celui-ci serait si petit qu’il ne pourrait contenir que des centimes.

Le groupe anonyme de 4ème Œil Corporation a contacté le porte-parole du greffe de la cour de St. Lucie, à Fort Pierce. Joseph Abreu balaie l’existence d’une telle collection : « La centaine de pièces à conviction de Gerard Schaefer demeure conservée au tribunal. » « J’ai exagéré mon importance, j’ai parfois dit des conneries, confesse-t-il, penaud. J’ai toujours fait des blagues sur ma page, j’écris neuf informations exactes et puis je glisse une plaisanterie. Je peux comprendre que c’est confondant. » Il poursuit en confiant une de ses facéties ; il aurait fait croire à ses fans avoir acheté la maison de Jeffrey Dahmer à Milwaukee. Délicat quand on sait que cet assassin, arrêté en 1991, nécrophile et cannibale, auteur de 17 meurtres, gardait des crânes humains dans les tiroirs de sa cuisine et un cœur dans le congélateur. « J’ai écrit que j’allais y ouvrir un restau végétarien. Ce n’est pas de bon goût, en effet. » Et puis, comme si le vrai et le faux n’étaient que deux variables élastiques, il poursuit : « Dans mes livres, attention, tout est vrai, rigoureusement. Une fois, j’ai inventé un serial killer qui n’existe pas, j’ai même fabriqué la biographie le concernant. » Il ne se souvient plus de son nom.

Le gendarme excuse Bourgoin : « Il a dû se laisser un peu emporter par son auditoire. »

Le plus fou dans cette cavalcade de mensonges, qui lui tinrent lieu de CV, demeure que Bourgoin aurait pu s’en tenir à son strict savoir. Il aurait vraisemblablement eu la même carrière, le même succès, les mêmes rentrées d’argent. Car son expertise est, de l’avis des professionnels, phénoménale. Les magistrats, les policiers, les gendarmes ne regrettent pas de lui avoir confié des conférences, et, s’ils ont suivi les révélations sur Internet, ils se déclarent satisfaits de ses prestations passées, soit cinq cours à l’Ecole nationale d’administration pénitentiaire d’Agen, cinq conférences en décembre 2001 au Centre national de formation de police judiciaire à l’école de gendarmerie de Fontainebleau et deux conférences pour l’Ecole nationale de la magistrature, en 2015 et 2018. Jacques Dallest, aujourd’hui procureur général à Grenoble, organisait ces formations. « Je lui ai demandé de prendre la parole dans une session consacrée aux crimes de sang et crimes de sexe. Son savoir livresque est exceptionnel. »

Yves Charpenel, magistrat à la retraite, ancien procureur général et directeur des affaires criminelles à la chancellerie, salue également « ses connaissances indiscutables. Et puis, il faut lui reconnaître un mérite. Il est le premier à avoir mis dans le débat public l’existence du crime sériel en France. Il y a vingt ans, personne ne voulait l’admettre. Il a œuvré seul, il touchait juste ». Avant de rejoindre la Direction générale de la gendarmerie, le colonel Joël Vaillant dirigea de 1985 à 1991 la section de recherches consacrée aux disparus de Mourmelon, une des premières affaires françaises de « meurtriers sériels ». « Son expertise m’a été utile, jamais lors de nos conversations je n’ai relevé la moindre distorsion. » Le gendarme excuse Bourgoin : « Il a dû se laisser un peu emporter par son auditoire. »

« Ça me fait du bien de dire la vérité, de parler enfin, conclut-il

Enquêteur au SRPJ de Montpellier, ce policier, qui, toujours en service, ne souhaite pas que son nom soit publié, a enquêté sur l’affaire des disparitions de la gare de Perpignan, quatre meurtres de femmes entre 1995 et 2001. Des crimes dont il a parlé en privé avec Stéphane Bourgoin. « Quinze ans avant l’arrestation du coupable, son analyse était exacte. Il avait compris les habitudes de l’assassin, deviné son quartier de résidence, son milieu socio-professionnel. Il avait raison sur tout. » S’il a échangé, lors de conférences ou de séances de signature avec des enquêteurs, Stéphane Bourgoin n’a en revanche jamais été associé à un dossier en cours, il n’a jamais été expert devant un tribunal et n’a jamais rencontré un suspect ou un condamné. Il n’est, ni plus ni moins, qu’une exhaustive mémoire du crime en série. Et celle-ci l’a dévoré.

« Ça me fait du bien de dire la vérité, de parler enfin, conclut-il. J’ai réalisé en revenant sur tout ça que j’avais rencontré plus de serial killers que ce dont je me souvenais. » Vraiment ? Bourgoin en a filmé 9 aux Etats-Unis. Où sont les 77 ? « Oui, certains je les ai juste aperçus dans les couloirs de prison, ou les cours de promenade. » Observant cet homme, prisonnier égaré dans ses turpitudes, on ne sait plus s’il faudrait compatir ou questionner encore et encore cette folie. Pourquoi ? Pourquoi tant de mensonges ? « Oui, c’est vrai. Quand je vous parle, je me dis que j’en ai dit des bobards. Quelle connerie. » 

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