Hier, l’Apple Watch (montre connectée de la marque Apple, NDLR) permettait à ses utilisateurs de lire leurs e-mails, d’accéder à différentes applications (météo, cartes…) et même – miracle – de connaître l’heure. Aujourd’hui, la montre intelligente veut servir à bien plus : sauver des vies. C’est, en tout cas, l’objectif de la compagnie Apple, qui tente de s’imposer dans le secteur de la santé pour conquérir des utilisateurs plus âgés.

En septembre, deux applications de la nouvelle Apple Watch ont obtenu le feu vert de la FDA (Food and Drug Administration), l’autorité de contrôle sanitaire aux États-Unis : l’une est un électrocardiogramme qui mesure le rythme cardiaque du porteur de la montre, l’autre permet de lui envoyer une notification en cas d’irrégularités. Avec cette validation, l’Apple Watch devient officiellement un appareil médical produisant des données jugées fiables.

Montres connectées, flacons intelligents…

Aux États-Unis, ce genre de produit a le vent en poupe. En plus des applications santé d’Apple, des moniteurs d’activité et de sommeil connectés de FitBit et de la montre intelligente Study Watch d’Alphabet, validée par la FDA début 2019, les applications et appareils médicaux portables à usages divers ont fait florès.

Parmi eux, des flacons intelligents qui rappellent au patient de prendre ses médicaments, des inhalateurs connectés pour les asthmatiques, des implants qui envoient des données au médecin et au patient… Le pari de leurs créateurs : lutter contre certaines maladies en plein essor outre-Atlantique, comme le diabète ou le pré-diabète (qui touchent 100 millions d’Américains), l’obésité et même la dépression.

Les Américains en sont friands. Selon une étude de février 2019 du cabinet Accenture, 53 % d’entre eux sont ouverts à l’utilisation de ce genre d’outils connectés dans le domaine de la santé. Ils étaient 39 % en 2016. « La médecine a longtemps été une science paternaliste où le médecin avait toujours raison. Ce n’est plus le cas. Le patient veut plus de transparence et de collaboration », observe Kevin Campbell, le PDG de Pacemate, une entreprise de données médicales.

Des ristournes sur les assurances

L’explosion de cette médecine connectée s’accompagne de questions, notamment sur la fiabilité et la protection des données récoltées. Le secteur des assurances, lui, y voit une mine d’or. Depuis l’an dernier, John Hancock Financial, l’un des leaders du secteur aux États-Unis, utilise des données de santé collectées via des appareils portables (montres, smartphones…) pour encourager ses assurés à adopter un mode de vie sain, donc moins coûteux pour la compagnie. Les clients remplissant leurs objectifs d’exercice physique bénéficient de réductions sur leur prime d’assurance. Apple et Aetna, un autre grand assureur, ont conclu un partenariat qui va dans le même sens.

« On dit aux assurés que porter ces appareils leur permettra d’avoir des remises, mais ils partagent des portraits très détaillés de leur vie sans savoir ce que l’on peut en faire », critique Kate Crawford, professeure à New York University (NYU). Elle craint que les personnes les moins fortunées se sentent contraintes de s’y livrer pour s’offrir ces réductions. « C’est le début d’une forme punitive de surveillance capitaliste qui utilise les données contre nous. »