Les “petites mains” du Palais-Bourbon ont dû frémir, en découvrant le rapport annuel des services de l’Assemblée sur l’activité des collaborateurs. Il y a de quoi : selon les statistiques officielles, les 1.900 collaborateurs de l’hémicycle auraient, en moyenne, travaillé moins d’une heure supplémentaire chacun en 2018. C’est en tout cas l’estimation qu’on obtient en divisant les 1.669,80 heures supplémentaires déclarées l’an passé, par l’effectif total des collaborateurs au 1er janvier 2019.

Bien sûr, la réalité est tout autre. “C’est effarant de voir ce genre de chiffres”, s’inquiète Patrice Petriarte, administrateur-adjoint à l’Assemblée nationale et délégué de l’Union syndicale Solidaires. Et pour cause, confrontés à de multiples tâches au service de leur député-employeur, les assistants parlementaires débordent, pour l’immense majorité d’entre eux, le cadre légal des 35 heures. “Mon temps de travail moyen était de 9 à 12 heures par jour. 50 heures par semaine, fourchette basse”, raconte une ancienne “petite main” de l’Assemblée, qui a décidé de changer d’air fin 2018. Patrice Petriarte, qui arpente les couloirs du Palais-Bourbon depuis près de 30 ans ne dit pas autre chose : “Il y a un vrai problème. Non seulement la durée de travail est très extensible, mais en plus, le droit à la déconnexion est rarement respecté. Les collaborateurs doivent être disponibles le soir, le week-end…”

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Les députés-employeurs se mettent à la faute

Officiellement inexistantes, ou presque, les milliers d’heures supplémentaires effectuées chaque année par les collaborateurs parlementaires représentent un cas édifiant de non-respect du droit du travail. “Les députés-employeurs empêchent toute déclaration d’heures supplémentaires pour ne pas entamer leur crédit collaborateur”, déplore Patrice Patriert, en référence à cette manne mensuelle de 10.581 euros que l’Assemblée nationale met à disposition de chaque député.

“Ma députée estimait que nous étions au forfait tous horaires - sans référence à un horaire de travail déterminé - pourtant réservé aux cadres dirigeants”, abonde une ex-collaboratrice, qui a travaillé dans le giron du groupe LREM. Parmi les 1.900 assistants parlementaires recensés au 1er janvier, seuls 282 étaient au forfait jours. Un statut qui permet au député-employeur de s’affranchir du respect de la durée légale hebdomadaire, sans avoir à déclarer les heures supplémentaires de son collaborateur. Chez la plupart des autres députés, dont les assistants sont salariés en CDI (1.806 contrats) ou CDD (138), la déclaration des heures supplémentaires semble donc être une option. Il s’agit pourtant d’une obligation légale…

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