Le musée des impressionnismes Giverny : reflets d’une collection

En 1893, Gustave Caillebotte (1848-1894) entreprend de décorer la salle à manger de sa propriété du Petit Gennevilliers et imagine d’y créer un univers végétal. Aux portes en trompe-l’œil s’ajoute une vaste toile destinée à être marouflée sur les murs. Traitée sans aucun effet de perspective, elle évoque un mouvant parterre de marguerites, rythmé par la répétition des motifs. Mise en place, elle doit brouiller la perception de l’espace architectural et proposer une solution profondément novatrice à la question du décor peint.

« Reflet de soleil sur la rivière » témoigne de la méthode de travail de Maurice Denis (1870-1943), théoricien du groupe des Nabis. En effet, pour composer ses œuvres, l’artiste s’inspire d’impressions saisies sur le motif, avant d’exécuter le tableau en atelier. Tout comme Claude Monet, il s’intéresse ici à la représentation du soleil et de son reflet sur l’eau. Denis voue une grande admiration à Monet, et ses écrits abondent de références à l’impressionnisme.

Installé en Normandie en 1912, Pierre Bonnard (1867-1947) voit régulièrement Monet et se rend à plusieurs reprises à Giverny où il assiste à l’élaboration du cycle des « Nymphéas ». Ce rare dessin, croqué à l’occasion d’un déjeuner chez Monet, témoigne de leur amitié. Bonnard campe ici en virtuose le décor et les personnages d’une scène familière. Avec une réjouissante liberté, il oppose la frêle silhouette de Marthe au buste massif du maître des lieux.

« Étude Port-en-Bessin (étude n°5, l’avant-port) » est une des toutes premières marines exécutées par Paul Signac (1863-1935) alors qu’il n’a pas vingt ans. La visite d’une exposition d’œuvres de Monet l’a décidé en 1880 à choisir la carrière de peintre et depuis, il travaille à la manière impressionniste. C’est à Port-en-Bessin que le jeune autodidacte consacre ses premières études du littoral normand. Les effets de lumière se reflétant à la surface de l’eau et l’animation des ports restent ses thèmes de prédilection quand, en 1886, il adopte la technique de la division des tons.

À partir de 1896, Maximilien Luce (1858-1941) renonce progressivement à la touche néo-impressionniste et retrouve au tournant du siècle un style proche de l’impressionnisme, dont les fulgurances colorées annoncent parfois le fauvisme. Il passe l’été 1914 à Kermouster près de Lézardrieux, où il peint des paysages témoignant d’un art apaisé. À son habitude, il y structure énergiquement la composition. La liberté de touche, la dominante chromatique bleu et vert, et l’analyse de la lumière très pure du littoral breton sont proches du travail de Monet à la même époque.

En 1904, Jean Francis Auburtin (1866-1930) se rend pour la première fois à Varengeville où il trouve, dès lors, sa plus grande source d’inspiration. Comme Monet avant lui, il arpente inlassablement les lieux afin de s’imprégner du paysage. Portant une attention particulière à la composition, Auburtin fait évoluer sa peinture vers une plus grande simplification du motif et privilégie la douceur des tons et les effets de matière. Variant les cadrages et les points de vue, il sublime l’instant où le soleil auréole les nuages.

C’est en 1994 que le peintre japonais Hiramatsu Reiji (né en 1941) découvre les Grandes Décorations de Monet au musée de l’Orangerie. C’est une véritable révélation. La dévotion que Hiramatsu Reiji voue à Monet le conduit à effectuer différents séjours en Normandie, sur les pas du maître français : Rouen, Le Havre, Honfleur, Étretat, Fécamp, Deauville ou encore Trouville, et bien sûr la maison et le jardin de Giverny. On retrouve chez Hiramatsu certains des enjeux développés par Monet, notamment les dimensions monumentales, les qualités décoratives ou l’absence de perspective.