"Openbanking" : s'ouvrir pour survivre

Nous sommes en train de changer de modèle bancaire. L'industrie fermée qui développe son offre, ses produits, ses services par-devers elle n'existera bientôt plus ; l'ouverture des données bancaires imposée en début d'année est en train de la rendre rapidement obsolète. Par Ronan le Moal, Directeur général du Crédit Mutuel Arkéa
Ronan le Moal, Directeur général du Crédit Mutuel Arkéa
Ronan le Moal, Directeur général du Crédit Mutuel Arkéa (Crédits : Crédit Mutuel Arkéa)

Les banques doivent accepter d'ouvrir leur système d'information à des acteurs tiers - tout en garantissant bien sûr la protection de leurs données clients. Elles doivent en faire une opportunité, exploiter elles aussi les modèles opérationnels des acteurs du secteur, tirer tout le parti de ce que l'on appelle l'open banking. C'est comme cela que de nouvelles coopérations peuvent se mettre en place.

Bien sûr, je prêche pour ma paroisse... C'est une pratique que nous observons depuis longtemps au Crédit Mutuel Arkéa : notre banque se distingue par les liens qu'elle a tissés avec les « barbares », ces startups de la fintech qui recourent à toutes les potentialités du numérique, des algorithmes pour bouleverser les usages et les métiers. Nous avons bâti un écosystème solide en finançant et accompagnant Younited Credit, Fortuneo, Leetchi et beaucoup d'autres, pour développer des offres avec elles - au total, nous avons multiplié nos investissements par 25 en cinq ans, au point de réaliser 28% des montants investis dans les startups bancaires françaises en 2017.

Je veux désormais lancer un appel aux startups, aux acteurs de taille intermédiaire, aux entreprises de la fintech, à tous les technophiles qui ne l'ont pas encore fait d'adopter ce modèle de l'open banking, de partager leurs données et process pour fonctionner comme autant de satellites complémentaires. Avoir une chaîne décisionnelle courte est un atout considérable qui permet une réactivité précieuse en matière de partenariats et d'investissements.

Je veux lancer un appel, aussi, à tous les grands groupes bancaires. Ils voient bien sûr déjà l'opportunité de capter ces nouvelles startups, ces nouveaux produits, de les accompagner sur le marché ; les investissements dans les fintechs se sont développés de manière exponentielle ces dernières années.

Mais disons les choses franchement : les grands groupes s'inscrivent trop souvent dans une logique d'appropriation des compétences, de centralisation extrême, au risque d'étouffer toute initiative chez les startups cibles - considérées comme autant de concurrentes possibles.

À eux de voir dans les fintechs non pas des concurrentes mais des ressources pour faire évoluer leur offre. Il y a tant à gagner en mariant la force de frappe financière des banques traditionnelles et le potentiel transformateur des nouveaux acteurs du marché !

Car quel résultat peut-on attendre de l'openbanking ?

D'abord, l'innovation. Aucune entreprise ne peut internaliser entièrement l'innovation, quelle que soit sa puissance financière, la force de sa R&D : il y aura toujours, mathématiquement, plus d'acteurs innovants en externe qu'en interne. Ce sont les investissements, l'intelligence collective qui engendrent l'innovation. Cela peut impliquer de laisser les fintechs travailler librement, préciser leur concept, avant de développer des synergies entre les start-ups d'une part, entre elles et nos réseaux de distribution d'autre part.

Car l'objectif n'est pas d'innover pour innover. L'objectif est de travailler dans une logique client, de recréer une proximité avec lui, ce qui implique de capter les nouveaux usages. Je pense aux applications qui permettent aux utilisateurs d'avoir une visibilité non seulement sur leurs comptes chez une banque, mais sur l'ensemble de leurs comptes. Voilà ce que permet l'openbanking : développer une meilleure offre, développer des services complémentaires avec un point d'entrée unique.

L'idée est de ne plus partir des produits pour les imposer à l'utilisateur, mais de partir des attentes de l'utilisateur pour développer des produits adaptés ; de le replacer au cœur des offres bancaires. C'est le sens d'une expérimentation que nous mettons en place à la rentrée en Aquitaine : notre réseau de banque de détail travaille avec une fintech qui proposera bientôt un nouveau service à nos sociétaires et clients, dans une logique de bénéfice pour eux.

Ne perdons pas de vue que l'utilisateur final est déjà en passe de reprendre le pouvoir, avec des phénomènes comme le financement participatif qui font sortir les prêteurs bancaires du circuit... Toute banque qui ne s'adapte pas davantage aux attentes de ses clients est à mon sens vouée à disparaître.

Canalisons donc collectivement le potentiel de l'openbanking pour proposer de meilleurs services, de nouvelles offres, pour transformer la chaîne de valeur bancaire. Il y va de la capacité des banques à innover et à garder leurs clients. Préparons-nous, en un mot, à la révolution de notre modèle... Et préparons-nous-y rapidement - j'ai envie d'ajouter : avant qu'il ne soit trop tard.

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Commentaire 1
à écrit le 06/09/2018 à 10:12
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Oui ce serait bien quand même que l'on puisse se faire une idée précise des sommes faramineuses qui sont concernées par la fraude fiscale ! Ah c'est pas ça dont vous nous parlez peut-être... ?

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