Spotify entame de nouvelles négociations avec l'industrie de la musique
La plateforme, qui cherche désormais à accroître ses marges, discute depuis plusieurs semaines avec les labels qui détiennent deux tiers de son catalogue.
Quand une relation montre des fêlures, il est parfois utile de faire le point. Entre Spotify et les labels, le mariage se complique depuis plusieurs mois, le premier s'estimant trop dépendant des seconds. La plateforme de streaming musical entame donc de nouvelles négociations de licences avec les labels et ayants droit détenant la grande majorité de son large catalogue d'artistes. Une première depuis son introduction en Bourse il y a presque un an, le 3 avril 2018. Selon le « Financial Times » , les discussions qui durent des mois voire des années en sont aux « premières étapes ».
Ces négociations arrivent à un moment où les incidents se multiplient entre les labels et la plateforme suédoise. Une plainte de Warner devant la justice indienne, le géant américain accusant Spotify d'avoir « faussement revendiqué une licence légale » pour exploiter le million de titres qu'il détient sur le territoire. Ou la prise de participation dans la plateforme de distribution aux artistes Distrokid , comme pour montrer aux labels qu'il peut lui aussi traiter directement avec les artistes. Ou bien encore, plus récemment, l'appel interjeté par la plateforme d'une décision d'un tribunal américain octroyant aux auteurs-compositeurs une forte augmentation de leurs redevances grâce aux plateformes de streaming.
Rapport de domination
Il faut dire que Spotify se sent de plus en plus à l'étroit dans cette relation avec les labels et cherche, via ses différentes gesticulations, à s'émanciper. Les labels - plus précisément les majors de la musique, Universal Music, Sony Music Entertainment et Warner Music -, détiennent à eux trois deux tiers du catalogue de la plateforme. Celle-ci est dans l'obligation de leur verser près de 70 % de ses revenus, si elle souhaite d'offrir à ses abonnés 96 millions abonnés payants, un catalogue de 35 millions de chansons comprenant les plus grandes stars comme Drake, Justin Bieber ou encore Ariana Grande…
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Mais depuis son introduction en Bourse, la plateforme, qui avait d'abord indiqué vouloir se concentrer sur son nombre d'abonnés , cherche aussi à faire grimper ses marges. Entre 2016 et 2017, la marge brute annuelle de la plateforme suédoise est donc passée de 16 % à 22 %. Au cours de son dernier trimestre, elle a même atteint 26,7 %.
La phase de discussions qui se déroule actuellement est donc une chance pour Spotify de tout remettre à plat. Mais elle pourrait également déboucher sur une simple reconduction des « deals » actuels. Et quand on demande à Daniel Ek, directeur général de Spotify, si les récents événements ont endommagé ses relations avec ses fournisseurs, il rappelle les 10 milliards de dollars versés par l'entreprise au secteur de la musique et les 10 ans de déclin qu'a traversés le secteur, avant que sa plateforme et d'autres du même modèle viennent relancer l'industrie. Preuve que le rapport de domination entre les deux parties est loin d'être aplani.
Jean-Philippe Louis