Les Québécois sont plus enthousiastes que les Canadiens des autres provinces par rapport à la télémédecine, selon un sondage qui sera dévoilé ce lundi. Plus de la moitié d’entre eux veulent y avoir recours dorénavant. Cela peut être lié au fait que les Québécois ont moins vu de médecin durant le confinement qu’ailleurs au pays.

« On voit que les Québécois sont plus réceptifs à la télémédecine », commente le Dr Abdo Shabah, urgentologue et membre québécois du C.A. de l’Association médicale canadienne (AMC), qui a commandé le sondage. « Ça reflète ce que je vois dans ma pratique. »

Moins de la moitié des Québécois préfèrent maintenant voir un médecin en chair et en os, selon le sondage de l’AMC. Au Canada, la moyenne est de 58 %, et seul l’Ontario, parmi les autres provinces, a un taux inférieur à 60 % de préférence pour un médecin « en présentiel », pour utiliser le terme qui a cours en ces temps de pandémie.

Le Dr Shabah pense qu’il y a probablement un lien avec le fait que seulement 49 % des Québécois disent avoir consulté un médecin durant le confinement, contre une moyenne canadienne de 78 %. En Ontario, 85 % des gens disent avoir consulté un médecin, généralement par télémédecine. Le terme utilisé dans le sondage est « obtenir les conseils d’un médecin ».

« C’est un lien qui doit être étudié », dit le Dr Shabah.

Paradoxalement, les Québécois ont moins consulté de médecin pendant la pandémie surtout parce qu’ils n’ont pas eu accès à une consultation téléphonique (21 % contre une moyenne canadienne de 34 %), par vidéoconférence (2 % contre 6 %) ou par message texte ou courriel (1 % contre 4 %). Les textos et les courriels étaient pratiquement inexistants au Québec dans les communications avec les médecins avant la pandémie, alors qu’ailleurs au Canada, 2 % des consultations avaient lieu de cette manière.

Le Dr Shabah établit aussi un lien entre l’engouement pour la télémédecine et le fait qu’un Québécois sur cinq n’a pas de médecin de famille, une proportion trois fois plus élevée qu’ailleurs au pays. « C’est un problème, parce que la télémédecine fonctionne bien avec des patients qu’on connaît bien, pour l’ajustement de dosage d’un médicament, par exemple, dit le Dr Shabah. Quand on voit quelqu’un pour la première fois, il faut faire un examen physique complet avant d’établir un premier diagnostic. »

Autre surprise, les Canadiens qui habitent en zone rurale ne sont pas plus susceptibles que ceux des villes de préférer la télémédecine. Il n’y a pas non plus de différence entre les jeunes et les vieux, mais les données sur l’âge ne sont pas très affinées, se limitant à plus ou moins de 44 ans. 

Des éléments à peaufiner

Le Dr Shabah a lui-même connu des problèmes avec la télémédecine avec les personnes âgées durant le confinement. « Ça marche assez bien si on a un proche aidant pour établir la communication, mais ces temps-ci, souvent, c’est impossible. Il faut développer de nouveaux outils de télémédecine pour les personnes âgées. »

L’Ontario, qui avait avant la pandémie l’un des systèmes publics de télémédecine les plus avancés du Canada, prévoyait payer les actes médicaux en télémédecine à un tarif inférieur aux actes en personne. Durant le confinement, la plupart des provinces, dont le Québec, ont accepté de payer la télémédecine au même tarif que le présentiel. Qu’en pense le Dr Shabah ? « C’est sûr qu’une consultation en télémédecine va en moyenne plus vite, parce qu’on ne fait pas un examen physique complet. C’est donc normal que le tarif soit moins élevé. Mais ça ne devrait pas pénaliser les médecins, parce qu’ils peuvent voir plus de patients. Le système de santé y gagne aussi. »

Le sondage a été mené auprès de 1800 Canadiens du 14 au 17 mai, par Abacus Data. Les résultats ont été pondérés sur la base du recensement. La marge d’erreur est de 2,3 %, 19 fois sur 20.

Une version antérieure de ce texte utilisait erronément le terme « signes vitaux » au lieu d'« examen physique complet » pour désigner la portion d'une consultation médicale qui est plus difficile avec la télémédecine.