POINT DE VUE

Pose d’un garrot tourniquet en pré-hospitalier : technique et suivi

Dr Dominique Savary

Auteurs et déclarations

9 janvier 2017

Le blog du Dr Dominique Savary –urgentiste, réanimateur

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Dans les années 2000, le garrot tourniquet a été mis de côté dans les formations grand public, il ne fallait plus poser de garrot, notamment dans la formation PCS1 (prévention secours civique) alors que dans le même temps, la médecine militaire a promus ce dispositif, ce qui lui a permis de combattre un certain nombre de morts évitables sur terrain de combat.

Plus récemment, suite aux attentats de Paris, nous avons vu apparaitre des recommandations pour mettre en place des kits « damage control » qui incluaient ce dispositif.

Pour autant, le garrot a aussi sa place dans la gestion quotidienne de la médecine pré-hospitalière, c’est ce que nous rappelle Michelle Scerbo dans un article de décembre 2016 de Prehospital Emergeny Care [1]

De nombreux  bancs d’essai ont été réalisés avec les multiples garrots présents sur le marché,  en particulier par l’armée américaine.

Au final, deux types de garrot sont aujourd’hui reconnus : le garrot tourniquet et le garrot pneumatique utilisé au bloc opératoire en chirurgie orthopédique principalement.

Le garrot a pour principe d’interrompre la circulation sanguine en aval de son lieu d’implantation afin de stopper un saignement. Il doit donc exercer une pression suffisante sur la peau pour se transmettre aux structures sous-jacente et occlure la circulation artérielle.

Selon la formule de Graham, la pression artérielle d’occlusion (PAO) d’un membre dépend à la fois du diamètre du membre, de la largeur du garrot utilisé, de la pression artérielle systolique et diastolique. Cette PAO dépend également de la nature des tissus sous-jacents, donc de la présence d’un ou de deux os au niveau du membre concerné.

Ces recommandations proposent donc de poser le garrot à la racine des membres mais ce dogme a toutefois fois été discuté, en particulier dans un article du colonel Jean François Kragh, un auteur qui a beaucoup travaillé sur les garrots, et qui présente dans sa publication 428 garrots posés au cours de la guerre en Irak. On voit qu’il y a une efficacité certaine du garrot posé sur l’avant-bras ou sur la jambe.

L’important est donc l’efficacité du garrot et, nous l’avons vu, elle est directement en lien avec la largeur du dispositif. Elle doit être d’au moins 38 mm pour le garrot tourniquet. A noter que 2 garrots simultanés sont moins efficaces qu’un seul garrot de bonne largeur. Il  faut le poser directement sur la peau et pas sur les vêtements qui pourraient faire des plis et auraient des conséquences sur les parties molles sous-jacentes.

Enfin, il est également recommandé de mettre en place une protection thermique sur le membre sous le garrot pour éviter une hypothermie qui pourrait être secondairement délétère.

Règles d’or après la pose d’un garrot en préhospitalier

  • Noter l’heure et ne pas la recouvrir.

  • Quand le patient est en sécurité, toujours  réévaluer la nécessité de maintenir  un garrot posé sur le terrain sauf s’il existe une amputation, un état de choc ou si la pose excède 4 heures. Il sera aussi nécessaire de réaliser une surveillance de l’efficacité du garrot tout au long de la prise en charge.

Conséquences de la pause d’un garrot

  • Contraintes de cisaillement directement sous le dispositif qui peuvent être évitées par la largeur du garrot.

  • La survenue d’une douleur importante au bout d’une trentaine de minutes. Jean Pierre Estebe (réanimateur Rennes) qui a beaucoup travaillé sur la place de ce dispositif en chirurgie réglée propose l’adjonction soit de morphine, soit de kétamine ou une anesthésie locorégionale à ces patients.

  • Enfin les conséquences c’est bien sûr l’ischémie périphérique du membre. On sait que si elle est prise en charge dans les deux heures, elle aura peu de conséquences mais au-delà de 6 heures, il y aura une perte définitive du membre garroté.

Certes, la gestion d’un garrot en situation pré-hospitalière et en situation catastrophique, comme lors d’un  attentat, n’est pas la même mais il y a toujours 3 points à retenir :

  1. il faut s’équiper de dispositifs efficaces et donc suffisamment larges,

  2. il faut toujours vérifier l’efficacité du dispositif, -

  3. il faut soigneusement orienter le patient et faire préparer son accueil par les équipes chirurgicales avec l’aide de la régulation médicale pour que la suite de la prise en charge soit la plus efficiente possible.

 

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