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Salimata Diop : "En Afrique, les femmes artistes sont restées trop longtemps invisibles"

Salimata Diop
Salimata Diop, directrice artistique de la foire d'art contemporain AKAA. Photo Antoine Tempé

Longtemps restées dans l’ombre, les artistes africaines gagnent du terrain et de la visibilité sur la scène de l’art contemporain. Entretien avec Salimata Diop, directrice artistique de la foire AKAA (1).

Lefigaro.fr/madame. - Les artistes africaines semblent assez peu visibles dans le paysage artistique mondial. Est-ce que la foire AKAA (pour Also Known as Africa, NDLR) va leur offrir une nouvelle visibilité ?
Salimata Diop. - Il existe peu de travaux écrits sur les artistes africains contemporains et quasiment rien sur les femmes. Celles qui ont existé vont tomber dans l'oubli et on risque de perdre tout un patrimoine artistique féminin parce qu'il n'y a pas de publications. Même si AKAA est une foire d'art contemporain à but commercial, nous sommes forcément conscientes d'avoir une mission et nous sommes fières des 23 femmes qui seront présentes pour cette première édition. Pendant les trois jours, nous proposons aussi des rencontres thématiques interrogeant l'art africain contemporain et l'une des sessions est consacrée à la question du genre dans l'histoire de l'art. Pour moi, en tant que directrice artistique de cet événement, c'est une question très importante.

Est-ce que la foire AKAA reflète ce qui se passe sur le continent africain actuellement ?
Même s'il y a Africa dans AKAA, notre sélection est très inclusive et ne se limite pas à une zone géographique. Le point commun des œuvres présentées c'est l'Afrique quelle que soit l'origine de l'artiste. Nous avons aussi tenu à donner une chance aux jeunes galeries qui voient le jour sur le continent. Je pense, par exemple, à des jeunes femmes galeristes comme Valerie Kabov qui a créé First Floor Harare, à Addis Fine Art fondée par Raku Sile à Addis Abeba, à Circle Art Gallery de Nairobi ouverte par Danda Jaroljmek et aussi à la galerie de Julie Taylor, Guns and Rain, qui est à Johannesburg. Ces galeristes engagées soutiennent cette génération d'artistes émergents et notamment des femmes. Ce nouveau dynamisme prouve que les choses évoluent et que les femmes ont une chance à saisir.

Les artistes africaines ont-elles un rôle à jouer par rapport à la situation de leurs concitoyennes ?
Certaines se définissent ouvertement comme des artistes engagées pour la cause des femmes, pour d'autres c'est plus implicite. Toutes celles que j'ai rencontrées ont un engagement extraordinaire vis-à-vis de leur art. Leur parcours et leur détermination servent de modèles pour celles qui suivent, ce sont des pionnières. Même si toutes n'abordent pas le féminisme dans leur travail, beaucoup d'entre elles s'engagent au travers d'activités annexes. Par exemple, la photographe Angèle Etoundi Essamba a créé avec Céline Seror, IAM (Intense Art Magazine) , un magazine dédié à la création artistique africaine au féminin.

Le numérique joue un rôle important dans le développement économique de l'Afrique, qu'en est-il pour l'art ?
Grâce au numérique, un nouveau monde est en train de naître. Pour l'art contemporain africain c'est très important et ça change la donne. Par exemple, sur le continent, les femmes photographes sont de plus en plus nombreuses. Pour elles, le digital est le meilleur moyen de montrer leur travail. Internet permet aussi d'atteindre des personnes très éloignées du marché de l'art, notamment les femmes. Mais il faut encore faire évoluer les mentalités et éduquer les gens à la curiosité via Internet. Grâce au digital, les artistes africaines qui étaient jusque-là invisibles deviennent visibles.

(1) AKAA : Also Know As Africa. Du 11 au 13 novembre 2016 au Carreau du Temple, 4 rue Eugène Spuller 75003 Paris. Plus d'infos sur akaafair.com

Aperçu en images de la foire AKAA

AKAA 2016

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