Ces start-up qui réveillent la France

VIDÉO. Réuni par "Le Point", un jury d'experts a passé au crible 1 500 jeunes entreprises françaises. Un palmarès inédit et plein de promesses pour notre pays.

Dossier coordonné par avec , , Maëlle Lafond,

"Friends". Florian Douetteau (à gauche), fondateur et dirigeant de Dataiku, spécialiste de l'analyse prédictive, avec une partie de son équipe, à Paris. © RGA/REA

Temps de lecture : 5 min

Les notes électriques résonnent sous les lustres et dorures. Basses, guitares et batterie à l'appui, une dizaine d'entrepreneurs ont décidé de réveiller le salon de l'Horloge du quai d'Orsay. Au micro, Frédéric Mazzella, numéro un de BlaBlaCar, Antoine Jouteau, PDG du Bon Coin, Marion Moreau, de la Fondation Sigfox, Grégory Salinger (Videdressing), Erwan Menard (Scality) ou encore Christophe Dousteyssier (Konemara), accompagnés par les ex-Matmatah (Viens donc faire un tour à Lambé). Ce soir de septembre, le groupe d'entrepreneurs The Digitals, reçu au ministère des Affaires étrangères, reprend à gorge déployée Je rêvais d'un autre monde. « Vous devez sentir ici le poids des années », avait lancé en préambule le ministre Jean-Marc Ayrault. N'est-ce pas en effet face à cette cheminée Napoléon III que Robert Schuman a prononcé la déclaration du 9 mai 1950, le texte fondateur de la déclaration européenne ? Nullement assommé par le poids des années, The Digitals a ensuite entonné Résiste, de France Gall.

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Hacker la campagne présidentielle, voilà la mission que s'est fixée France Digitale, le lobby des entrepreneurs et des investisseurs du high-tech en France. Car, si, sous les lambris de la République, notre ministre des Affaires étrangères explique que « le numérique est la nouvelle grammaire de notre société » (sic), peu de nos responsables politiques ont compris le profond changement en cours. Dans ce dossier, Le Point met en avant d'audacieuses initiatives nées en France qui bouleversent déjà la médecine prédictive, la transmission des savoirs ou encore la manière de se déplacer. Ce sont par exemple Gecko Biomedical, qui réalise des pansements sous la peau, Iconem, qui fait renaître les monuments détruits par la guerre, Cardiologs, qui met l'intelligence artificielle au service de l'anticipation des crises cardiaques, Wandercraft, qui permettra aux paraplégiques de remarcher. Rien n'est impossible, comme on peut le voir dans ce dossier où 300 start-up sont à l'honneur. Un choix cornélien, car nos « capteurs » nous en ont fait remonter une centaine par semaine !


Troublemakers

« La révolution numérique transforme tout sur son passage, analyse Jean-David Chamboredon, président du fonds Isai, qui a investi dans BlaBlaCar. Nous devons nous former à un secteur qui ne connaît pas le chômage et libérer les investissements en France, où l'on investit, toutes proportions gardées, dix fois moins qu'aux États-Unis. » Si l'ex-porte-parole du Mouvement des pigeons met autant d'énergie à défendre les entrepreneurs, c'est qu'ils apparaissent encore comme des crazy ones, des troublemakers ou encore des square pegs in a round hole, littéralement des chevilles carrées dans un trou rond. Bref, des iconoclastes, que Steve Jobs mettait pourtant, lui, à l'honneur dans un clip intitulé Think Different, en 1984, où il célébrait le boxeur Mohamed Ali, l'aviatrice Amelia Earhart ou encore Pablo Picasso. Ces personnalités ont en commun d'avoir eu la volonté de bousculer l'ordre établi.

Le premier courrier reçu par chaque créateur d'entreprise devrait être une lettre de félicitations, au lieu d'une facture du RSI.

En France, faire grandir une entreprise est encore difficile. En août, le joyau de la robotique chirurgicale Medtech, né à Montpellier, est passé sous pavillon américain. « On s'est battu durant quatorze ans, mais je ne peux pas rivaliser éternellement avec mon Opinel », a regretté son créateur, Bertin Nahum, qui a revendu son entreprise à l'américain Zimmer. Le spécialiste de la balance connectée Withings est, lui, passé entre les mains du finlandais Nokia, quand Save, le service de recyclage de téléphones basé à Paris, a été mis en cessation de paiement et lutte pour sa survie. « Les boîtes les plus ambitieuses lèvent de l'argent à Londres et pas à Paris - mais trop tard et pas assez, ce qui les empêche de l'emporter sur leurs concurrents étrangers mieux financés », explique sans fard Nicolas Colin, cocréateur de l'incubateur The Family. Or la création d'entreprises est un formidable outil d'émancipation. Moussa Camara le prouve tous les jours. Porte-parole des Déterminés, il va former l'an prochain, à Cergy, où il a grandi, 100 jeunes des quartiers à l'entrepreneuriat, quand Thierry Petit, cocréateur de Showroomprivé, fait de même à Roubaix. La start-up Leka ouvre les autistes au monde, Grizz guide les aveugles grâce à des microvibrations et RogerVoice permet aux sourds de téléphoner. Certaines se lancent à l'assaut des États-Unis. Accompagnées par Business France, une quarantaine vont se rendre au CES, à Las Vegas, à l'instar du système d'expérience virtuelle Hypersuit, qui permet de se prendre pour Iron Man.

Facilitateur

À la France de leur offrir les meilleures conditions pour s'épanouir. Si beaucoup vantent l'utilité du Crédit impôt recherche ou l'action de la Banque publique d'investissement, ils ne veulent plus d'instabilité fiscale. « J'ai parfois l'impression de courir un 100-mètres avec un sac de 40 kilos sur le dos », confie Jean-Marc Patouillaud, associé gérant du fonds d'investissement Partech, citant Montaigne - « Les princes me font assez de bien quand ils ne me font point de mal ». Le rôle de l'État doit être celui de facilitateur. « Le premier courrier reçu par chaque créateur d'entreprise devrait être une lettre de félicitations, au lieu d'une facture du RSI », insiste le partner d'Idinvest Benoist Grossmann. « Une entreprise se développe d'autant plus facilement que les règles ne changent pas tous les trimestres », explique enfin Stéphane Treppoz, PDG de Sarenza.

Reste à accélérer la prise de conscience. Qui sait que la France a, avec Qwant, un moteur de recherche qui n'enregistre pas l'historique de nos données ? « Faire naître des plateformes alternatives est un enjeu de souveraineté numérique », souligne Tariq Krim, qui appelle à élire un « tech-président », quand Gaspard Koenig demande au Medef de coopérer davantage avec les petites structures. D'ailleurs, faire grandir nos talents est la meilleure réponse aux géants du Web américain, les fameux Gafa (Google, Amazon, Facebook, Apple), qui paient si peu d'impôts. Comme l'explique Marie Ekeland, faire émerger une « tech européenne » permettra aussi de faire progresser nos valeurs. Un chantier exaltant pour nos entrepreneurs prêts à créer « un autre monde », comme l'entonne The Digitals.

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Commentaires (3)

  • BOURRIQQUE

    J'ai regardé avec attention la liste des sociétés sélectionnées. Je peux vous dire que cette liste est très incomplète y compris pour celles qui sont en voie de réussite Salutations

  • philgril

    Tous ces entrepreneurs n'ont pas encore vu la tête d'un contrôleur de l'urssaf ou des impôts ni s'être frotté aux 3600 pages du code du travail avec un salarié indélicat... De quoi doucher bien des enthousiasmes. Leurs chances de survie seront nettement plus grandes si leur business s'effectue hors de France à l'image des grands groupes. Fuyez !

  • excalibur2015

    Ils sont bien courageux ces entrepreneurs mais ce ne sont pas eux qui font la loi en France ce sont les administrations !
    Impots, charges, cotisations, réglementations, normes ont raison de la plus forte des convictions.
    Au bout d'un an combien de ces start-ups persistent dans leurs projets ?
    Un réel suivi est-il possible ?
    On comprend bien pourquoi en France l'objectif n°1 est de defendre le pré-carré de toutes les administrations où à l'exemple du soviétisme règne l'autoprotection de l'emploi (des fonctionnaires), le règne sans partage des syndicats et le financement par le contribuable.

    Je souhaite bon courage aux entrepeneurs après 2017 lorsque Juppé sera president pour poursuivre l'action de destruction du tissu social et economique comme le lui dictira Bruxelles.