Les chatbots séduisent l'e-santé

Les chatbots séduisent l'e-santé Les start-up de l'e-Health doivent réduire les frictions dans leurs relations avec des internautes de moins en moins adeptes des applis mobiles.

"Combien de cigarettes avez-vous fumées hier ? Combien de verres avez-vous bus ?". Entre deux conversations avec des amis sur Facebook Messenger, les internautes pourront bientôt discuter avec "Smart Alfred", le bot imaginé par le français Betterise, qui édite la plateforme de santé du même nom. Smart Alfred s'enquiert par des questions simples du moral, de la santé, de l'activité et des habitudes de son interlocuteur et pousse des contenus en retour : conseils d'activités sportives, recettes… "Des articles correspondants au profil, comportement et pathologies de l'utilisateur, au contexte…", explique le CEO de Betterise, Paul-Louis Belletante.

Smart Alfred envoie des contenus personnalisés (cliquer pour zoomer). © Betterise

Smart Alfred est pour l'heure en version bêta et ne concerne que Messenger mais pourrait à terme être disponible sur Whatsapp, Allo de Google, par sms et sur toute autre appli de messagerie s'ouvrant aux agents intelligents. "Plusieurs partenaires, assurances, mutuelles ou établissements de soin testent actuellement Smart Alfred, explique Paul-Louis Belletante. A la rentrée, cela sera opérationnel."

Pour les acteurs de la e-santé, ces bots pourraient s'avérer un très bon moyen de pallier le problème de "download use and trash" des applications – l'utilisateur teste l'appli et la délaisse rapidement, après quelques utilisations, parce qu'il oublie de l'ouvrir et de tenir ses informations à jour. "Les thérapies digitales doivent s'intégrer à l'usage, note Paul-Louis Belletante. Il faut qu'il y ait de moins en moins de friction à l'utilisation." D'autant que les mobinautes utilisent toujours moins d'applications et que les nouvelles ont bien du mal à se faire une place. "On arrive à la fin du cycle des applications traditionnelles en silos, qui ont du mal à communiquer les unes avec les autres", renchérit Julien Maldonato, directeur conseil industrie financière chez Deloitte.

A terme, les bots s'aventureront sur le curatif

Aujourd'hui, Facebook fait figure d'interface rêvée pour l'utilisation de chatbots intégrés. "12% des Français se connectent chaque jour à Messenger", rappelle Paul-Louis Belletante. "Comme WeChat en Chine, Facebook va ouvrir ses services pour devenir LE canal d'interaction sur tous les secteurs", renchérit Julien Maldonato. La santé en tête. "C'est d'autant plus vrai que les jeunes générations sont de plus en plus ouvertes à ce genre d'avancées, ajoute Mathieu Grosheny, spécialiste de l'assurance de personnes et protection sociale chez Deloitte. 59% des Français pensent que les GAFA sont légitimes dans la prévention santé et la proportion passe à 68% chez les 18-24 ans."

Healthtap propose des articles correspondant aux questions. © Healthtap

Les premiers acteurs à se lancer offrent principalement des services répondant à des questions simples et non personnalisées ou bien se cantonnent au secteur du bien-être comme Betterise. L'américain Healthtap a créé un chatbot Messenger qui propose des articles sur la santé correspondant à la question de l'utilisateur. En Inde, Lybrate a imaginé un bot similaire qui remplit un rôle de questions/réponses simples. Mais "sur du moyen ou long terme, tout le cycle de la santé pourrait être couvert par cette interaction homme-machine, assure Julien Maldonato. Dans le bien-être mais aussi la prévention et le curatif, l'accompagnement dans le traitement …"

Si les bots ne sont pas encore assez experts pour s'aventurer sur le terrain de la curation, ils pourraient être rapidement de très bons outils de recueil d'informations. "Le chatbot peut poser des questions simples pour connaître l'état de santé du patient, ses pathologies, ses risques, avant de mettre les informations à disposition du médecin, décrit Mathieu Grosheny. Il pose un premier bilan de santé et peut permettre d'avancer une visite médicale si besoin ou au contraire de la reculer."

"En France, les acteurs traditionnels de l'assurance, notamment, vont se positionner sur ce canal d'interaction et travaillent déjà le sujet", assure Julien Maldonato. Prochaine étape : les chatbots à reconnaissance vocale - Google y travaille déjà, tout comme Amazon avec Alexa - pour un usage moins intrusif et très utile pour les seniors par exemple. Les GAFA sont en course pour capter la relation entre humains et services robotisés.