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Comment Orange, SFR, Free et Bouygues Telecom fourbissent leurs armes

Après le rachat de SFR par Numericable, la consolidation du secteur semble, pour un temps, faire une pause. Pour les quatre acteurs, l’heure est à la différenciation commerciale.
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Orange
L'attribution des fréquences très haut débit destinées aux opérateurs de télécommunications mobiles, aura lieu en décembre 2015
NATHAN ALLIARD/PHOTONONSTOP

Il a suffi d’une petite phrase pour remettre le feu aux poudres. Jeudi 20 novembre, la banque d’affaires Morgan Stanley a réuni tous les grands noms des télécoms à Barcelone, notamment les Français Stéphane Richard, PDG d’Orange, et Thomas Reynaud, directeur financier d’Iliad (Free), ou encore Dexter Goei, directeur général d’Altice, la maison mère de Numericable-SFR. "Si nous recevons un appel de Bouygues vendredi, alors pourquoi pas ?" lance ce dernier, quand on l’interroge sur son intérêt pour Bouygues Telecom. L’Anglo-Saxon a dit tout haut ce que tout le parterre devant lui se chuchotait en aparté. L’opérateur créé par Martin Bouygues est-il la prochaine proie de Patrick Drahi, l’actionnaire principal d’Altice ?

Grand chantier à Bouygues

Le magnat du BTP n’est officiellement pas vendeur de sa filiale. Au contraire, "il se voit comme un acteur de la consolidation, dans le sens où c’est lui qui rachèterait un concurrent", explique un dirigeant du secteur. "J’ai dit à Martin Bouygues que nous allions nous préparer pour la guerre de Cent Ans", rapporte Olivier Roussat. Le PDG de Bouygues Telecom a entrepris un plan de transformation gigantesque, notamment en réduisant drastiquement les coûts et en investissant dans les réseaux du futur, en partie avec Orange et SFR. Pour l’instant, l’opération n’a pas convaincu. "Bouygues Telecom finira par se faire racheter, juge un banquier. Il n’a aucune marge de manœuvre, car il ne génère pas de trésorerie."

Dans cette guerre sans merci, Martin Bouygues a concentré ses flèches sur Xavier Niel, l’actionnaire d’Iliad. Les deux meilleurs ennemis des télécoms françaises avaient enterré la hache de guerre au printemps pour tenter de mettre la main sur SFR, mis en vente par Vivendi, mais c’est Patrick Drahi qui a emporté le morceau. Après avoir lancé sa box low cost à 19,90 euros, Bouygues Telecom a assigné fin novembre Free devant le tribunal de commerce de Paris pour pratique commerciale trompeuse, en l’accusant de brider les débits de ses abonnés mobiles lorsqu’ils sont en itinérance sur le réseau Orange. Iliad a riposté en enjoignant son rival de stopper sa récente campagne de communication vantant la qualité de son réseau fixe basé, selon lui, sur des études contestables.

Ambiance. Près de trois ans après l’arrivée de Free Mobile, le marché se retrouve au même point, structuré autour de quatre opérateurs. Et en attendant une éventuelle consolidation du marché, chacun affûte ses armes. Les concurrents de Xavier Niel, après avoir fait fondre les prix de leurs forfaits, ont repensé leur modèle. "Tout le monde s’était trompé sur la structure de coûts d’Iliad, qui lui a permis de baisser les prix de moitié tout en restant rentable", souligne Benoît Flamant, de la société de gestion Fourpoints. Free arrive ainsi à déployer un réseau de façon efficace, notamment grâce à un système d’information construit de façon très économique, alors qu’Orange, SFR et Bouygues Telecom subissent l’héritage de systèmes informatiques complexes. Avec deux forfaits seulement, Free a ringardisé les catalogues incompréhensibles des grilles tarifaires, et prouvé le coût d’une telle opacité.

Polarisation du marché

En attendant qu’une business school se penche sur le cas d’étude de l’arrivée de Free Mobile et mesure les effets réels du choc causé par ce lancement, en particulier sur l’emploi ou les investissements, deux phénomènes se révèlent déjà. D’abord la polarisation du marché avec, d’un côté, le service premium d’Orange, qui investit tous azimuts et, de l’autre, le modèle low cost de Free, même si ce terme est rejeté par Xavier Niel, soucieux de son image d’innovateur et convaincu que son organisation est celle qu’adopteront tous les opérateurs.

Pour se différencier, Orange a déployé la 4G mobile et la fibre optique. Au cours des neuf premiers mois de l’année, 3,8 milliards d’euros ont été dépensés. "C’est presque un abus de position dominante", caricature un consultant. L’ex-opérateur historique a ainsi pu rattraper en un temps record Bouygues Telecom à qui l’Arcep, l’autorité de régulation, avait donné une longueur d’avance en lui permettant de transformer ses fréquences 2G en 4G.

Ces trois années de bataille ont en effet coïncidé avec l’arrivée des réseaux ultrarapides, la 4G dans le mobile et la fibre dans le fixe. C’est le deuxième point majeur. "Les choses se jouent sur la convergence et c’est ce qui a permis à Free d’aller aussi vite", souligne Matthieu Courtecuisse, le PDG du cabinet Sia Partners. Pas étonnant que Xavier Niel ait choisi d’accorder des prix encore plus réduits aux détenteurs de sa box. Ce sont les recrues les plus simples et les moins coûteuses. Cette technique est aussi celle de Numericable-SFR. Les résultats de ces stratégies, à l’épreuve des ventes de fin d’année, seront scrutés début 2015. Chacun tentera alors d’identifier le maillon faible de ce jeu à quatre. 

 

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