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Stabilité et sécurité ne s'opposent pas

"Le pacte de sécurité l'emporte sur le pacte de stabilité" : une formule malheureuse de François Hollande. Non pas que la sécurité ne soit pas une priorité, mais économies et nécessité causée par l'état de "guerre" ne s'opposent pas. Surtout quand les réformes annoncées ne représentent qu'une très faible partie de nos dépenses publiques. Ainsi, la formule du Président sonne trop comme une excuse à l'oubli des réformes structurelles. Lorsque tous les déficits publics s'additionneront, personne n'ira regarder quelle est la diversité de leurs origines.

Après les attaques dont Paris et les Parisiens ont été victimes, il est plus que jamais temps de regarder en face nos politiques publiques. Pendant les dernières législatures, la France a vu enfler ses dépenses sociales jusqu’à ce qu’elles atteignent 15% des dépenses sociales mondialesL'Organisation mondiale du Travail chiffre les dépenses sociales mondiales à 4.500 milliards d'euros : de 29% de notre PIB en 2000 à 34% en 2015, soit environ 250 milliards de plus en 15 ans (de 450 milliards d’euros en 2000 à 715 milliards aujourd’hui). Et de gonfler aussi les dépenses locales : plus 100 milliards d’euros en 15 ans (de 150 à 250 milliards d’euros), et de diminuer ou stagner les dépenses régaliennes (Justice, pénitentiaire, Défense).

La Fondation iFRAP a eu l’occasion à de nombreuses reprises au cours des dernières années de tirer la sonnette d’alarme sur les réductions de postes dans la Défense, l’abandon des projets de construction de prisons, la non-exécution des peines ou la récidive. Et ce, alors qu’en parallèle, les revalorisations de minima sociaux, le mille-feuille social et les inventions de nouvelles dépenses (de type rythmes scolaires pour une facture annuelle de plus de 800 millions d’euros) ne cessaient d’affluer sans qu’aucune réforme de fond ne soit entreprise. Couper sur le régalien était la facilité. Maintenant que la France est entrée en état d’urgence, il est encore plus crucial de revoir la répartition des missions publiques. Plus que jamais, l’État doit se recentrer sur ses missions régaliennes. Cette semaine, nous chiffrons les dépenses supplémentaires (600 millions en 2016 dont environ 200 en dépenses de personnels de l’État) annoncées à juste titre par le gouvernement  et nous redisons et nous redirons toujours avec force que ces mesures ne doivent pas enterrer l’objectif d’équilibre budgétaire et de baisse de la pression fiscale qui sont les antidotes contre le chômage et la désespérance.

Avoir obtenu le feu vert et la bénédiction de Bruxelles ne change rien au problème de fond de nos finances publiques. Les Britanniques, avec une dépense publique de 44% (contre 57% pour la France) par rapport au PIB dépensent plus que nous en dépenses militaires et paramilitaires : 57 milliards de dollars au total contre 52 milliards en 2013. Quant aux dépenses de Justice, elles sont de 129 euros par habitant en France contre 223 euros par habitant au Royaume-Uni. Et ce, sans évoquer le pénitentiaire (57.435 places de prison contre 87.784 rien qu’en Angleterre et au Pays de Galles). Les économies à réaliser en réorganisant nos services publics locaux, notre système de retraite, de santé, de chômage, de formation et d’éducation… se chiffrent en milliards. Rien n’a été fait en profondeur.

Renoncer aux reformes structurelles serait aussi dramatique pour notre avenir commun que de refuser de renforcer nos forces de sécurité et notre arsenal de lutte contre le terrorisme. On affronte d’autant mieux les crises qu’on a des marges de manœuvre pour le faire. La bonne gestion publique est toujours un gage de souveraineté.